26 avril 2024
Paris - France
INTERNATIONAL

Pourquoi les États-Unis ne veulent pas envoyer leurs chars Abrams en Ukraine

Une réunion entre alliés de l’Ukraine discute ce vendredi de l’aide, et notamment de l’envoi coordonné d’armes à Kiev. Va-t-on fournir des chars lourds tels que des Leopard allemands?

L’Ukraine réclame depuis des semaines des chars lourds occidentaux modernes pour repousser l’invasion russe. Les seuls chars lourds envoyés jusqu’ici par l’Occident sont d’anciens modèles de conception soviétique. Beaucoup ont déjà été perdus dans la bataille.

Les alliés de Kiev ont déjà livré beaucoup de matériel pour soutenir les Ukrainiens. Dernièrement, ils ont annoncé l’envoi de chars légers et de blindés de transports de troupes. Plusieurs pays, dont la Suède et les États-Unis, viennent encore de promettre l’envoi de matériel, dont des blindés.

Les livraisons occidentales se poursuivent donc. Mais pas de chars lourds Abrams annoncés… Mercredi, les États-Unis ont expliqué qu’ils n’étaient pas prêts à fournir à l’Ukraine leurs chars lourds les plus avancés. Or, les Européens ont tendance à suivre les décisions américaines en matière de choix de matériel à envoyer à Kiev…

Pourquoi les États-Unis ne veulent-ils pas livrer leurs chars lourds Abrams à l’Ukraine?

Parce qu’il s’agit d’un équipement compliqué à utiliser, du point de vue de la conduite, de l’électronique, de la maintenance… « Le char Abrams (…) est cher, il requiert une formation difficile, il a un moteur d’avion à réaction. Je crois qu’il consomme 11 litres de kérosène au km », a expliqué le numéro trois du Pentagone, Colin Kahl. « Ce n’est pas le système le plus facile à entretenir. »

Pourquoi les Allemands sont-ils, eux aussi, réticents à fournir du matériel lourd?

Berlin craint que l’utilisation de matériel lourd occidental par les Ukrainiens ne soit considérée, par le Kremlin, comme le franchissement d’une ligne rouge, parce que ces chars allemands serviraient directement à attaquer l’armée russe et non pas à une parade défensive, et ne suscite une escalade.

Par ailleurs, les Allemands craignent d’exposer leur matériel de pointe sur le terrain ukrainien, à la merci des Russes qui pourraient en décoder les spécificités.

Cette même raison est aussi évoquée côté français, où on rechigne à livrer des chars Leclerc. La crainte de manquer de chars, en cas d’embrasement du conflit, pèse aussi dans la décision.

Mais Berlin a laissé jeudi soir la porte ouverte à la possibilité de permettre aux alliés de fournir à l’Ukraine des chars lourds de fabrication allemande, déclarant que cela « se clarifierait dans les prochaines heures ou demain matin ».

Dans une interview accordée à la chaîne de télévision ZDF, le ministre allemand de la Défense Boris Pistorius a précisé que « personne n’exclut l’envoi de chars Leopard, et que l’autorisation ou l’approbation de la livraison par d’autres partenaires européens peut être donnée« . Washington est « l’allié principal au sein de l’Otan et c’est pourquoi il est important que nous (…) fassions cela en étroite coopération avec les Américains« , a-t-il ajouté.

L’Ukraine recevra-t-elle des chars lourds de conception occidentale, comme elle en demande?

Oui, puisque le Royaume-Uni a déjà promis d’envoyer des Challenger 2.

La Pologne a proposé d’envoyer 14 chars allemands Leopard 2, mais a besoin, pour cela, de l’accord de Berlin, et attend aussi l’assentiment des alliés.

Ce vendredi, en Allemagne, une réunion va discuter de la fourniture de matériel à l’Ukraine, avec un objectif de coordination.

Tout cela devrait être discuté ce vendredi à Ramstein, une base américaine en Allemagne. Le groupe de contact pour l’Ukraine, qui rassemble quelque cinquante pays emmenés par les États-Unis, s’y réunit pour parler de la coordination de l’aide à ce pays agressé par la Russie, notamment sur la fourniture de blindés lourds. Soit les alliés s’accordent sur l’envoi d’un seul type de chars, soit pour différents types de matériel, avec les aléas logistiques liés à un tel choix. Formations, pièces de rechange et munitions seraient différents.

Les alliés discuteront aussi de la fourniture de nouveaux systèmes de défense antiaérienne.

À quoi serviront ces nouveaux chars lourds?

Les combats sur la ligne de front sont très intenses. Les Ukrainiens semblent bien avoir perdu Soledar, ville proche de Bakhmout que les Russes tentent de prendre depuis des mois. Les chars lourds, fortement blindés, pourraient apporter aux troupes de Kiev une puissance de feu supplémentaire, en appui à l’infanterie. Ce sont des chars d’assaut susceptibles de faire reculer l’ennemi et la ligne de front.

L’armée ukrainienne a déjà perdu de nombreux chars lourds depuis le début de la guerre en Ukraine. Elle demande de 250 à 350 exemplaires de chars modernes à ses alliés occidentaux, en urgence. Elle s’explique par les difficultés actuelles sur le front et aussi par le fait que les Russes semblent tout proches d’envoyer au combat de nouveaux hommes issus de la mobilisation. Au moins 150.000 soldats sont en formation.

Ce matériel pourrait aussi aider les Ukrainiens à lancer une nouvelle contre-offensive.

 L’Echo
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