L’Assemblée nationale débat vendredi d’amendements dans le cadre du projet de loi de programmation sur le développement. Le sujet des biens mal acquis s’invite à l’Assemblée nationale, vendredi 19 février, par voie d’amendements qui seront débattus en séance sur le projet de loi « de programmation relatif au développement solidaire et à la lutte contre les inégalités mondiales ». Ce texte, porté par le ministre de l’Europe et des affaires étrangères, Jean-Yves Le Drian, vise notamment à recentrer l’aide publique française sur l’Afrique subsaharienne et les dons plutôt que les prêts.
Le débat au sujet des biens mal acquis porte sur le sort des fonds confisqués par la justice française lors d’une condamnation pénale dans le cadre d’une affaire de corruption internationale. Actuellement, les fonds confisqués, quelles que soient la nature de l’infraction et la nationalité de son auteur, sont gérés par l’Agence de gestion et de recouvrement des avoirs saisis et confisqués (Agrasc) et reversés pour l’essentiel au budget général de l’Etat. Autrement dit, dans le cas de chefs d’Etat ou de membres d’un clan gouvernemental indélicats, leurs victimes, c’est-à-dire les populations spoliées, n’en voient pas la couleur.
« Engagement solennel »
L’actualité de 2021 devrait en fournir une illustration éclatante. La Cour de cassation, saisie d’un pourvoi par la défense, pourrait trancher définitivement dans les prochains mois le feuilleton des biens mal acquis par le vice-président de la Guinée équatoriale, Teodorin Obiang. Condamné pour blanchiment d’argent en ayant détourné quelque 150 millions d’euros entre 1997 et 2011, il a vu ses innombrables biens (dont un hôtel particulier avenue Foch et 17 voitures de luxe) confisqués. Si la loi est inchangée d’ici la décision de la haute juridiction, ces 150 millions d’euros iront directement dans les caisses de Bercy. Les affaires de bien mal acquis n’intéressent pas que les Guinéens. Des personnalités de la République du Congo (famille de Denis Sassou-Nguesso), du Gabon (clan de l’ancien président Omar Bongo) ou de la Syrie (Rifaat Al-Assad) ont été mises en cause.
Le Sénat a voté le 2 mai 2019 une proposition de loi du sénateur socialiste Jean-Pierre Sueur pour créer un fonds destiné à restituer aux populations victimes des ces spoliations les fonds confisqués par la justice française. Elle n’a jamais été débattue à l’Assemblée, le gouvernement semblant préférer d’autres modalités. Amélie de Montchalin, alors secrétaire d’Etat dans le gouvernement d’Edouard Philippe, avait pris devant les sénateurs « l’engagement solennel » de revenir avant la fin de l’année 2020 avec un dispositif législatif. Le gouvernement avait par ailleurs commandé aux députés Jean-Luc Warsmann (UDI) et Laurent Saint-Martin (La République en marche) un rapport sur les saisies et confiscations judiciaires. Remis en novembre 2019 au ministère de la justice, ce rapport préconisait notamment la création d’un dispositif ad hoc et transparent afin d’éviter une situation où l’Etat français s’enrichirait de la spoliation de population souvent déjà difficultés.
Le Monde Afrique
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