7 mai 2024
Paris - France
AFRIQUE INTERNATIONAL

Au Mozambique, le mégaprojet gazier dans l’inconnu après les attaques djihadistes

Amorcée en 2010, la ruée vers le gaz mozambicain a subi un coup d’arrêt après les offensives des Chabab à Palma, aux portes du futur site de Total. Les acteurs du gaz attendent un changement radical de la situation sécuritaire, mais l’état de l’armée locale et l’essor du trafic d’héroïne dans la région rendent cette perspective incertaine.

Ils ont réussi leur coup : remporter une bataille à valeur opérationnelle modeste, mais à grand retentissement symbolique et, à présent, leur guerre continue. Jusqu’où ? Quel est le prochain objectif des Chabab (« les jeunes »), affiliés à l’organisation Etat islamique (EI) et à nouveau insaisissables dans les forêts et les villages désertés du nord du Mozambique ?

Après l’offensive surprise du groupe djihadiste sur la ville de Palma, le 24 mars, à la frontière tanzanienne, et la débandade qui en avait découlé du côté des forces de sécurité, le gouvernement mozambicain avait déclaré, quelques jours plus tard, avoir repris la cité. Mais les Chabab sont parvenus à réinfiltrer Palma début avril et ont tué des habitants revenus sur les lieux. Cela ne s’est su que lorsque les têtes des malheureux ont été retrouvées…

L’enfer de l’attaque djihadiste contre la ville de Palma, au Mozambique

C’est ce genre de signature, la capacité des insurgés à défier les services de sécurité, qui conduit aujourd’hui l’industrie gazière tout entière à douter : et si l’infrastructure en développement dans la péninsule d’Afungi était en danger ? Palma ne se trouve qu’à quelques kilomètres des installations terrestres de ce mégaprojet international. Le groupe français Total, dont la participation se monte à 26,5 % dans l’affaire, est l’opérateur de l’une des trois entités destinées à produire du gaz naturel liquéfié (GNL). Le consortium aurait dû commencer ses activités d’exportation en provenance du site en 2024. Mais, depuis les attaques, tout est à l’arrêt.

D’autres groupes pétroliers, venus de toute l’Asie, comme la China National Petroleum Corporation (CNPC) et l’Oil India Limited (OIL), sont aussi impliqués, tant les découvertes, en 2010, des grandes réserves de gaz au large du Mozambique sont entrées dans les plans d’accès à l’énergie de ce continent qui considère l’océan Indien comme l’un de ses rivages.

Port de Pemba, au nord du Mozambique, le 30 mars. Il sert de base logistique à la construction des infrastructures gazières off-shore.

En juin 2019, Total a monté un tour de table qui en dit long sur l’importance du projet. Y participent les Etats-Unis (à hauteur de 5 milliards de dollars [4,2 milliards d’euros] d’argent public), le Japon (3 milliards de dollars), le Royaume-Uni, l’Italie, les Pays-Bas, l’Afrique du Sud et la Thaïlande, la Banque africaine de développement et quatorze banques commerciales. UKEF, l’organisme public britannique qui garantit les opérations à l’export, a dégagé plus de 300 millions de dollars pour aider ses entreprises nationales à investir dans le projet, et a garanti plus de 800 millions de dollars de prêts.

Le Monde Afrique avec AFP

 

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