Pour l’ancien président français, la surpopulation – africaine notamment – est la première cause de dérèglement climatique. Une affirmation qui, en plus d’être inexacte, s’appuie sur des théories climatosceptiques maintes fois battues en brèche par les experts. Mise au point en infographies.
Près de quinze ans plus tard, la controverse provoquée par son fameux discours de Dakar de 2007, qui lui avait valu une cinglante réponse d’une partie de l’intelligentsia du continent, n’a semble–t–il pas servi de leçon à Nicolas Sarkozy. En pleine promotion de son dernier exercice d’autobiographie, l’ancien chef de l’État français, qui tente au passage de faire oublier ses ennuis judiciaires, s’est livré à une analyse toute personnelle des causes du réchauffement climatique. Dans un entretien accordé à France 5, le 6 septembre, il a développé un argumentaire tendancieux. En plus de << ne pas être assez entré dans l’Histoire », l’homme africain, et plus spécifiquement les générations africaines futures, serait, selon lui, responsable de la crise climatique en cours. Au mépris des faits et du consensus scientifique mondial.
Climatoscepticisme
Tout en se trompant sur les termes scientifiques – «< il n’y a pas de dérégulation climatique » –, Nicolas Sarkozy pointe les risques supposés d’une « explosion démographique africaine » pour démontrer que c’est la surpopulation, et non le mode de vie occidental, qui engendre le dérèglement actuel. En jouant sur la peur d’une « déferlante migratoire africaine », savamment entretenue par une partie de la classe politique européenne, il s’emploie ainsi à diluer la responsabilité des pays industrialisés dans cette crise à laquelle les Africains paient injustement l’un des plus lourds tributs.
Climat : l’Afrique peut encore éviter la catastrophe
Alors que la planète vient de vivre les trois mois les plus chauds depuis 120 000 ans, que plus de 4 000 Libyens ont été tués dans un cyclone, qualifié de tropical, dont l’intensité est imputable aux conséquences du modèle économique actuel, un tel discours est d’autant plus problématique qu’il est tenu par un ancien haut responsable politique, donnant encore un peu plus d’écho au retour en grâce d’une certaine forme de climatoscepticisme auprès d’une frange de l’opinion publique. Il semble donc nécessaire de confronter, point par point, les affirmations de l’ancien président français aux faits.
Le point de vue de Nicolas Sarkozy
Le dérèglement climatique actuel est provoqué par les émissions de gaz à effet de serre (dioxyde de carbone, méthane, protoxyde d’azote) qui s’accumulent dans l’atmosphère. Les énergies fossiles (charbon, gaz, pétrole) sont responsables de plus de 75 % de ces émissions et de près de 90 % des rejets de carbone. Certes, la démographie.
a participé à cette augmentation, mais c’est moins let nombre d’êtres humains qui pèsent sur le climat que le mode de vie d’une petite partie d’entre eux.
Les scientifiques ont prouvé que l’augmentation des émissions n’est pas corrélée à la croissance de la population, mais bien au mode de vie qui prévaut dans les pays industrialisés. L’Europe et l’Amérique du Nord, (1,3 milliard d’habitants), sont responsables de 51% du carbone émis depuis 1750, contre 3 % pour le continent africain. (1,2 milliard d’habitants).
La responsabilité des pays industrialisés est totale
Un Américain émet autant que 50 Camerounais
Ce que l’on devrait émettre en moyenne par an pour ne pas dépasser +1,5 °C de réchauffement climatique
« Moyen–Orient que du Nord
Les pays à la plus à forte croissance démographique sont les moins pollueurs
Emissions de CO, par habitant par rapport à la croissance démographique en 2019
Amérique du Nord en Europe
Emissions de CO, par habitant Afrique
Amérique du Sud
Singapour
Qatar
Oceanie
Au delà des disparités géographiques, le « budget carbone >>
est reparti de manière très inégale à l’échelle globale, les 1 % les plus aisés de la planète seraient responsables de plus d’émissions que les 50 % les moins riches. Une réalité qu’obère l’argumentaire de Nicolas Sarkozy, qui élude le sujet clé la répartition des ressources.
L’Afrique doit–elle rester pauvre pour sauver la planète ?
La croissance de la population – qui devrait se stabiliser
autour de 10 milliards vers 2050 constitue un enjeu fondamental que nul ne peut ignorer. Assurer le
développement des pays du Sud, sans suivre les traces de l’Occident et sa course à la croissance, qui a montré son potentiel destructeur, en est un autre. Pour autant, ce n’est pas aux Africains de réduire leur taux de natalité mais bien. aux gros pollueurs de changer de mode de vie. Prétendre le contraire, c’est retarder l’action. Ce n’est pas la démographie mais le mode de vie.
JM :source: global carbone /JA