L’ancien président ivoirien a déposé un recours ce 8 juin pour obtenir sa réinscription sur les listes électorales avant les locales, prévues le 2 septembre prochain.
« Non, non et non, je ne laisserai pas mon nom sali sans me battre ! » Ce 8 juin, Laurent Gbagbo a formellement déposé un recours dans un bureau local de la Commission électorale indépendante (CEI) du quartier d’Angré, à Abidjan. « On n’a pas mis mon nom sur la liste électorale, prétextant que j’ai été condamné après un procès qui m’a jugé parce que j’aurais braqué la BCEAO [Banque Centrale des États de l’Afrique de l’Ouest]. Je réfute avec vigueur une telle accusation », a affirmé l’ancien président ivoirien face à la presse.
Depuis que le fichier électoral provisoire a été transmis aux formations politiques le 20 mai, les cadres du Parti des peuples africains – Côte d’Ivoire (PPA-CI) ont plusieurs fois exprimé leur indignation et estimé que la non-inscription de leur leader était une injustice. Mais c’est la première fois que Laurent Gbagbo lui-même prend la parole sur le sujet.
Déchu de ses droits civiques et politiques
Bien qu’acquitté par la Cour pénale internationale (CPI), laquelle le jugeait pour des crimes contre l’humanité commis pendant la crise postélectorale de 2010-2011, l’ancien chef de l’État reste sous le coup d’une condamnation à vingt ans de prison par la justice ivoirienne dans l’affaire dite du casse de la BCEAO, qui remonte à 2011. La CEI a confirmé qu’il faisait partie de la liste des personnes déchues de leurs droits civiques et politiques que lui avait communiquée le ministère de la Justice.
Entouré de sa compagne, Nady Bamba, et de plusieurs cadres du PPA-CI, dont le président exécutif, Hubert Oulaye, le secrétaire général, Damana Adia Pickass, et le porte-parole, Justin Koné Katinan, Laurent Gbagbo a déroulé ses arguments : à l’en croire, le procès à l’issue duquel il a été condamné ne s’est fait dans le respect du droit ; il a aussi affirmé qu’il n’avait « jamais été convoqué » et n’avait pas reçu de copie du jugement.
L’ancien chef de l’État a également mis en avant la décision de la Cour africaine des droits de l’homme et des peuples (CADHP), qui a demandé en 2020 sa réinscription sur les listes. Dans un entretien accordé le 5 juin à Jeune Afrique, le président de l’institution panafricaine, Ibrahime Coulibaly-Kuibiert, avait expliqué que des mesures internes devaient être prises avant que la décision de la CADHP ne soit applicable.
« Une souillure »
Par ailleurs, l’ancien président a tenu à remercier les jeunes sympathisants qui ont déposé des réclamations (350 au total) pour obtenir sa réinscription. « Je leur dis que je suis debout et, tant qu’il faut se battre pour la dignité, je me battrai toujours, a-t-il ajouté. Je ne peux pas partir demain et laisser mes enfants avec un nom qui porte une souillure. »
Après une accalmie et des gestes d’apaisement, comme le dégel des avoirs de Laurent Gbagbo, le climat politique s’est de nouveau tendu ces derniers mois. L’arrestation de militants du PPA-CI et la remise en question de la fiabilité du fichier électoral et de l’indépendance de la CEI est source de tensions en amont des élections locales, lesquelles auront lieu le 2 septembre.
« Le temps pour moi de donner des coups est passé, a toutefois déclaré l’ancien président. Aujourd’hui, ce que nous devons faire, les présidents Henri Konan Bédié, Alassane Ouattara et moi, c’est de nous conduire de telle façon que nous laissions aux jeunes générations une Côte d’Ivoire pacifiée. »
Lundi, Damana Adia Pickass a affirmé que le parti voulait privilégier le dialogue pour obtenir la réinscription de Laurent Gbagbo sur les listes. Il a également rappelé qu’il était leur candidat naturel pour la présidentielle de 2025. Une délégation du PPA-CI a été reçue par le Premier ministre, Patrick Achi, le 7 juin.
JA