29 mars 2024
Paris - France
POLITIQUE

Côte d’Ivoire : pourquoi les relations entre Laurent  Gbagbo et Alassane Ouattara se sont (à nouveau) dégradées 

La grande complicité observée le 14 juillet lors de la rencontre entre Alassane Ouattara et Laurent Gbagbo naura pas duré bien longtemps. Récit dun énième revirement de situation entre le chef de lÉtat et son prédécesseur

Le 7 août, la présence de Laurent Gbagbo et dHenri Konan Bédié au côté dAlassane Ouattara à Yamousoukro, lors de la célébration de lanniversaire de lindépendance de la Côte dIvoire, était censée sceller la réconciliation entre lactuel et les anciens présidents. Las, la politique en a, une nouvelle fois, décidé autrement

Après avoir envisagé dassister aux festivités, Laurent Gbagbo a finalement décliné linvitation. Lexchef de lÉtat a préféré prendre un bain de foule, dans la soirée de ce même 7 août, au palais des congrès du Sofitel Ivoire dAbidjan, Aïcha Koné, la diva de la musique ivoirienne, célébrait ses quarante ans de carrière

Sétant entretenu avec Laurent Gbagbo au téléphone, Henri Konan Bédié, qui avait quant à lui assuré Alassane Ouattara de sa présence à Yamoussoukro, sest désisté à son tour. Selon nos sources, le patron du Parti démocratique de Côte dIvoire (PDCI) ne souhaitait pas prendre part à une scène de réconciliation tronquée, dans laquelle Gbagbo aurait brillé par son absence

Espoirs..

Pourquoi lancien président du Front populaire ivoirien (FPI) a-til choisi de décliner linvitation à la dernière minute ? Daprès nos informations, Laurent Gbagbo a estimé quAlassane Ouattara navait pas rempli une grande partie des engagements évoqués lors de la fameuse rencontre du 14 juillet, à savoir la libération dun certain nombre de militaires incarcérés

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Durant leur rencontre du 14 très conviviale et qui a eu lieu au Petit palais de la présidence , Laurent Gbagbo navait en effet que peu parlé de son propre sort, du dégel attendu de sa rente viagère ou encore de sa condamnation controversée à vingt ans de prison et à 329 milliards de francs CFA damende dans laffaire du braquage, au début de 2011, de lagence de la Banque centrale des États de lAfrique de lOuest (BCEAO) dAbidjan

Lancien président avait en revanche beaucoup plaidé en faveur de la libération dune quinzaine de militaires, dont les généraux Dogbo Blé, ancien commandant de la Garde républicaine, et Vagba Faussignaux, excommandant de la marine. Il avait aussi insisté sur le sort des colonels Ohoukou Mody et Jean Aby, du commissaire Osée Loguey et des commandants Jean Abehi et Anselme Séka Yapo

... et désillusions 

Comme argument pour la libération de ces gradés, Laurent Gbagbo avait évoqué le cas du général Philippe Mangou. Lancien chef détat major, qui avait pourtant donné de nombreux ordres pendant la crise postélectorale de 2011, na en effet pas été poursuivi par la justice mais a été nommé ambassadeur au Gabon puis en Allemagne. Gbagbo estimait ainsi que, si Philippe Mangou était resté libre, ses subordonnés de lépoque navaient pas à payer le prix fort

Alassane Ouattara lavait écouté attentivement et avait observé que nombre des personnalités citées ont été reconnues coupables de crimes de sang et ont été condamnées à de lourdes peines de prison. Concernant le général Mangou, il avait précisé que celuici avait très tôt fait allégeance aux nouvelles autorités, en 2011, tandis que dautres poursuivaient les combats. Enfin, il avait évoqué une probable libération conditionnelle pour au moins deux militaires

Dans lattente des libérations et de mesures de pardon, Laurent Gbagbo espérait avoir obtenu partiellement gain de cause. Pourtant, seuls le général Vagba Faussignaux et le commandant Abehi ont bénéficié de la liberté conditionnelle grâce à un décret présidentiel publié le 6 août, en même temps que la grâce présidentielle accordée à Laurent Gbagbo. Une annonce insuffisante aux yeux de lancien président, qui a ainsi considéré que lesprit de la rencontre du 14 juillet avait été trahi et a décidé dannuler sa venue à Yamousoukro le 7 août

JA

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