29 avril 2024
Paris - France
ECONOMIE

Canal de Suez : reprise du trafic après la remise à flot du porte-conteneurs Ever Givrant

L’immense navire bloquait totalement l’une des principales voies maritimes du commerce mondial depuis mardi. L’Autorité du canal de Suez (SCA) a annoncé lundi en milieu d’après-midi la « reprise du trafic ».

Les autorités du canal de Suez précisent que « l’arrière du navire s’est éloigné de 102 mètres de la rive alors qu’il était à quatre mètres seulement ». AFP 
Il s’était débloqué, s’est de nouveau placé de travers, pour finalement être remis à flot. Après un ultime caprice ce lundi, le porte-conteneurs Ever Given de 400 mètres de long, qui obstrue le canal de Suez depuis près d’une semaine, a été décoincé en milieu d’après-midi. L’agence Leth, une firme qui fournit des services aux clients empruntant le canal, a confirmé la bonne nouvelle à 15h13 sur son compte Twitter, quelques minutes après l’annonce d’un nouveau blocage. « C’est avec le plus grand plaisir que nous pouvons confirmer que l’Autorité du canal de Suez et le personnel ont réussi à relancer le M/V EVER GIVEN. Elle est actuellement en route vers Great Bitter Lake », assurant que le cargo n’était plus « cloué au sol ».

« Nous avons réussi ! » s’est réjoui Royal Boskalis, maison-mère de lasociété néerlandaise mandatée pour le « sauvetage » de l’Ever Given. « Je suis ravi d’annoncer que notre équipe d’experts, travaillant en étroite collaboration avec l’Autorité du canal de Suez, a réussi à renflouer l’Ever Given le 29 mars à 15h05 heure locale, rendant ainsi à nouveau possible le libre passage du canal de Suez », déclare Peter Berdowski, PDG de Boskalis.

« Je suis extrêmement fier du travail exceptionnel accompli par l’équipe sur place ainsi que par les nombreux collègues de SMIT Salvage et Boskalis chez eux pour mener à bien cette opération difficile sous l’œil attentif du monde, poursuit-il. Le manque de temps pour achever cette opération était évident et sans précédent. »

Le cargo semble doucement reprendre la navigation, au son des cornes de brume.

Plus tôt dans la matinée, un premier mouvement augurait la sortie d’une crise qui occasionne depuis mardi des milliards de dollars de pertes. La compagnie de service maritime Inchcape avait annoncé que le navire était « renfloué », une information reprise par plusieurs médias. L’autorité du canal ajoutait que le porte-conteneurs avait été remis à 80 % dans la « bonne direction ».

Cependant, le propriétaire du porte-containers précisait que l’Ever Given avait été « tourné » mais ne flottait pas encore. L’arrière du navire de plus de 200 000 tonnes s’était éloigné de la rive ouest du canal, selon les sites de visualisation du trafic maritime Vesselfinder et Myshiptracking. Ce que confirmaient les autorités, précisant que « l’arrière du navire s’est éloigné de 102 mètres de la rive alors qu’il était à quatre mètres seulement ».

Jusqu’à ce qu’en milieu de journée, l’Ever Green se remette en travers de la voie d’eau, anéantissant pendant quelques instants l’espoir d’un retour à la normale. Et même si le porte-conteneur géant n’obstrue plus ce passage hautement stratégique, il faudra, selon le chef de l’Autorité du canal, « trois jours et demi environ » pour que les navires en attente – plus de 400 – « traversent le canal », qui fonctionnera pour cela « 24 heures sur 24 ».

De son côté, le président égyptien Abdel Fattah al-Sissi s’était assez rapidement félicité lundi de l’opération « réussie ». « Les Egyptiens ont prouvé aujourd’hui qu’ils étaient toujours la hauteur », écrivait-il. C’était avant que le navire ne donne une ultime frayeur à tous les observateurs…

En fin de soirée dimanche, sur un constat d’échec des tentatives de renflouement, le fournisseur de services maritimes Leth Agencies avait affirmé dans un tweet que l’opération était reportée « jusqu’à ce que la puissance des remorqueurs soit suffisante ». Toutefois, de son côté, la SCA n’a annoncé aucun report, se bornant à dire dans un communiqué en début de soirée que « les opérations ont été intensifiées autour de la proue du navire ». Les espoirs reposaient dimanche sur une marée haute dans la soirée qui devait faciliter la tâche des sauveteurs. Le porte-parole de la SCA, George Safwat, avait précisé dimanche matin que quelque 27000 m3 de sable avaient déjà été dégagés, à 18 mètres de profondeur.

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Selon Ihab Talaat el-Bannane, ancien amiral égyptien, « l’accident s’est produit dans la partie du canal où le sol est rocheux et qui avait d’ailleurs été le plus difficile à creuser ». Le porte-conteneurs battant pavillon panaméen était entouré dimanche matin de quelques remorqueurs, selon un journaliste de l’AFP. Haut d’une soixantaine de mètres avec son chargement, il domine les champs et les palmiers alentours. Les environs étaient placés sous haute surveillance, avec des agents de sécurité du canal mais aussi des militaires et des policiers.

L’Ever Given est coincé depuis mardi en diagonale du canal, bloquant complètement cette voie d’eau d’environ 300 mètres de largeur parmi les plus fréquentées au monde. Le canal de Suez, long de quelque 190 km, voit passer environ 10 % du commerce maritime international et chaque journée d’indisponibilité entraîne d’importants retards et coûts. Au total, près de 400 navires étaient coincés dimanche aux extrémités et au milieu du canal reliant la mer Rouge à la mer Méditerranée, selon la SCA.

Dégâts économiques colossaux

Au moins une douzaine de remorqueurs et des dragues pour aspirer le sable sous le navire, ont été mobilisés dans les opérations. L’assureur Allianz a estimé vendredi que chaque jour d’immobilisation pourrait coûter entre six et 10 milliards de dollars au commerce mondial. Et les premières conséquences se font déjà sentir : la Syrie a indiqué samedi avoir commencé à rationner les carburants, face au retard de livraison d’une cargaison de pétrole. Onze navires partis de Roumanie et transportant 130000 moutons sont aussi affectés.

La valeur totale des biens bloqués ou devant emprunter une autre route diffère selon les estimations, oscillant entre trois milliards de dollars et 9,6 milliards. Les cours du pétrole ont connu de brusques hausses depuis le début de l’incident. Les autorités du canal ont affirmé que l’Egypte perdait entre 12 et 14 millions de dollars par jour de fermeture. Près de 19000 navires ont emprunté le canal en 2020, selon la SCA.

Le Parisien

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