Tentant depuis le mois dernier de rapprocher ses homologues béninois et nigérian, dont le différend douanier paralyse toute la région, le président ivoirien mène également une médiation parallèle entre Patrice Talon et Faure Gnassingbé, en froid polaire depuis de longs mois.
Arrivé le 14 août pour un court séjour dans la petite ville française de Mougins, dans les Alpes–Maritimes, le président béninois Patrice Talon, officiellement en vacances, devait y rencontrer son homologue ivoirien Alassane Ouattara, qui possède une résidence dans la très chic commune provençale et y séjourne chaque été. Las : annoncé en villégiature à Mougins depuis ce week–end, le président ivoirien est en réalité resté à Abidjan cette semaine, et n‘a donc pu poursuivre ses discussions avec Patrice Talon. Depuis le début de l‘été, les deux hommes sont cependant restés en lien constant, le président ivoirien s‘étant engagé dans une série de médiations pour tenter de réconcilier le Bénin avec plusieurs de ses voisins et tenter, par ce biais, de mettre fin aux problèmes douaniers récurrents qui paralysent le marché ouest–africain et pénalisent lourdement la Côte d‘Ivoire, principale économie de la région.
Trois présidents à huis clos
La première étape de ce marathon diplomatique a eu lieu le 15 juillet, dans la résidence personnelle du président ivoirien à Cocody, Riviera Golf. Ce jour–là, Alassane Ouattara a reçu à huis clos ses homologues béninois et togolais, venus assister, aux côtés d‘une vingtaine de chefs d‘Etat africains, au sommet pour la reconstitution des ressources de l‘Association internationale de développement (Banque mondiale), qui se tenait à Abidjan. A l‘issue du sommet, le président ivoirien a invité Patrice Talon et Faure Gnassingbé à le rejoindre à son domicile, et est resté plus de trois heures avec les deux hommes sans aucun témoin.
Deux semaines auparavant, l‘administration béninoise avait unilatéralement mis en place une nouvelle taxe de 9 millions de francs CFA (13 700 euros) sur chaque camion transitant sur son territoire en direction du Nigeria. Une mesure qui frappait de manière disproportionnée les entrepreneurs togolais et ivoiriens, dont les chargements restaient bloqués à la frontière (AI du 20/07/21).
Mais entre les présidents béninois et togolais, la discorde est bien plus profonde que ce différend douanier : comme l‘a raconté Africa Intelligence (AI du 31/03/21 et du 19/04/21), le cas de Reckya Madougou, conseillère et intime de Faure Gnassingbé devenue principale opposante de Patrice Talon, crispe les deux hommes. Patrice Talon soupçonne son homologue togolais d‘avoir épaulé, voire financé la campagne présidentielle de Reckya Madougou, incarcérée depuis le 5 mars pour « association de malfaiteurs” tandis que, de son côté, Faure Gnassingbé juge le traitement, par les autorités béninoises, de celle dont il fut très proche, injustifié, même s‘il s‘est toujours abstenu de s‘exprimer publiquement sur le sujet. Reckya Madougou a été une nouvelle fois entendue le 7 août par la Cour de répression des infractions économiques et du terrorisme et ses avocats ont
introduit une nouvelle demande de mise en liberté (une première avait été rejetée en juillet, avant la rencontre tripartite Talon–Ouattara–Gnassingbé).
Médiations douanières
Parallèlement à ses efforts pour réconcilier Patrice Talon et Faure Gnassingbé, Alassane Ouatarra persiste également à établir un dialogue entre les présidences nigériane et béninoise, dont le différend douanier paralyse l’économie de la sous région depuis deux ans (AI du 23/10/19). Un conflit qui s‘est encore aggravé avec la mise en cause, le mois dernier, des réseaux nigérians dans la saisie de drogue dans le port de Cotonou (AI du 12/07/21). A ce jour, les efforts du président ivoirien, dont les relations avec le chef de l‘Etat nigérian Muhammadu Buhari sont en dents de scie, peinent à porter leurs fruits.
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