Ephémère ministre des Outre-mer, la députée macroniste des Yvelines succède à Richard Ferrand à la présidence de l’Assemblée nationale.
1. Perchoir
Après cinq années passées à la tête de la commission des Lois, cette bûcheuse succède à Richard Ferrand, défait lors des législatives de juin, et devient, de facto, le quatrième personnage de l’Etat. Contrairement au Breton, elle n’appartient pas au premier cercle d’Emmanuel Macron.
2. Histoire
Une femme au Perchoir ? C’est une grande première dans l’histoire de la Ve République. Depuis Jacques Chaban-Delmas en 1958, 14 hommes s’étaient jusque-là succédé à l’Hôtel de Lassay (résidence des présidents de l’Assemblée). « C’est un moment important, un plafond de verre qui se brise, commente l’intéressée à “l’Obs”. C’est aussi l’aboutissement d’un long chemin pour les femmes. »
3. Avocate
Bien avant d’être gagnée par le virus de la politique, la Nancéienne, mère de cinq enfants, a porté la robe noire. A 26 ans, après des études de droit à Nanterre et une entrée au barreau de Paris, elle rejoint le cabinet du pénaliste Hervé Temime, qui passe aujourd’hui pour l’un des plus puissants avocats du pays. Elle fondera ensuite son propre cabinet avec deux associés à Neuilly.
4. Politique
Si elle est très brièvement passée par la section locale du PS à Tokyo, elle date son entrée en politique avec l’avènement du macronisme. En 2016, elle rejoint les rangs d’En Marche ! « J’ai tout de suite cru en cette vision : dépassement des clivages, progressisme. » Investie candidate dans les Yvelines dès l’année suivante, elle se paie le luxe d’envoyer au tapis un vieux routier de la droite, Jacques Myard.
5. Initiation
Elue, dans la foulée de son entrée dans l’Hémicycle, présidente de la commission des Lois, elle est accusée d’incompétence. Dans un écho, « le Canard enchaîné » écrit qu’elle ne saurait différencier un décret d’une loi. Décontenancée, elle manque de tout lâcher. Cinq ans plus tard, elle a su habilement retourner la situation, entretenant d’excellents rapports à gauche comme à droite. Avec des personnalités aussi diverses que son prédécesseur socialiste au perchoir Claude Bartolone ou le très conservateur Eric Ciotti. Lequel s’est fendu d’un SMS au lendemain de la défaite de Richard Ferrand. « Tu vas à Lassay ? Ce serait top. »
6. Benalla
Cette affaire reste la plus délicate de sa courte carrière politique. Nommée à l’été 2018 corapporteuse de la commission d’enquête parlementaire chargée de faire la lumière sur cette affaire qui a mis le feu à l’Assemblée et empoisonné l’Elysée, Yaël Braun-Pivet s’est subitement retrouvée sous le feu des critiques. Parce qu’elle refusait de convoquer des proches du président, la droite a hurlé à la partialité. « Cette séquence a été à la fois intense et fondatrice », confie-t-elle aujourd’hui.
7. Deuxième chance
La présidence de l’Assemblée, c’était son Graal. En 2018, elle avait déjà tenté sa chance avant de se raviser et de se rallier à la candidature de Richard Ferrand. Cette fois, elle n’a pas tergiversé : dès que la bataille pour le perchoir s’est ouverte, elle a démissionné illico de ses toutes nouvelles fonctions de ministre des Outre-mer. Trente-six jours et puis s’en va ? Des élus ultramarins, souvent issus de la Nouvelle Union populaire écologique et sociale (Nupes), ont protesté contre cette « marque de mépris ».
8. Globe-trotteuse
Au début des années 2000, elle met sa carrière d’avocate entre parenthèses et s’expatrie en Asie – à Taïwan, puis au Japon – pour suivre son mari, cadre chez L’Oréal. Après un crochet par le Portugal, la famille retourne en France. Où cette petite-fille d’un tailleur juif polonais s’investit pour les Restos du Cœur : elle chapeaute le centre de Chanteloup-les-Vignes, puis crée celui de Sartrouville.
9. Gros temps
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Elle a fait les Glénans (école de voile en Bretagne) et possède un voilier de 7,50 mètres basé dans le port de Pornichet, un « Django », qu’elle sort dès qu’elle le peut. Il lui arrive aussi de tirer des bords avec quelques-uns de ses camarades députés bretons, Jimmy Pahun et Erwan Balanant. « J’aime le vent, les éléments et les intempéries », glisse celle qui va désormais devoir contenir une Assemblée bouillonnante au sein de laquelle les macronistes ont perdu la majorité absolue.
10. Rééquilibre
Comme tous ses prédécesseurs, Yaël Braun-Pivet entend faire en sorte que l’Hémicycle soit un lieu où « s’exprime véritablement la démocratie ». « Je suis convaincue que l’Assemblée a un rôle crucial pour retisser le lien entre la politique et les citoyens », avance-t-elle. En décembre 2021, elle avait signé pour la Fondation Jean-Jaurès un plaidoyer pour un « Parlement renforcé » contenant vingt-cinq propositions visant à « rééquilibrer les pouvoirs ».