Lettre ouverte de Stéphane Gayet à Gbagbo. Ce médecin français est convaincu de la justesse du combat de l’ancien président ivoirien.
Monsieur le Président Gbagbo, je ne vous ai jamais rencontré et je ne suis même jamais venu dans votre beau et auparavant riche pays, la Côte d’Ivoire. Français blanc de France, fils de résistant chef d’équipe pendant l’occupation allemande, j’ai appris à vous connaître par l’intermédiaire de la diaspora ivoirienne de Strasbourg, où je vis.
J’ai eu beaucoup de difficultés à vous cerner correctement, tant la désinformation au sujet de la politique ivoirienne depuis 2002 a été la règle dans les médias français. C’est grâce à mes amis ivoiriens que j’ai fini par comprendre qui vous étiez vraiment. C’est en m’intéressant à votre parcours et à vos luttes d’ancien opposant politique que j’ai pu vous saisir. Car on ne connaît bien un homme que lorsque l’on s’est imprégné de son histoire personnelle.
Ce que j’ai compris de vous, c’est que vous ne vous êtes pas engagé dans le socialisme par opportunisme, mais par profonde conviction. J’ai découvert en vous un homme épris de loyauté, de justice et d’équité ;
un homme authentique ;
un leader réellement investi pour le bien de son peuple et de son pays ;
un homme d’État courageux n’ayant pas peur de résister aux puissances financières et politiques internationales.
Vous avez certainement des choses à vous reprocher, commis des erreurs préjudiciables, comme tout chef d’État. Mais je tiens à vous exprimer ici que je suis solidaire, pour l’essentiel, de vos options et de vos actions, car, nonobstant ce que l’on peut vous objecter, je considère que vous incarnez le juste combat d’une Afrique de l’Ouest victime d’un néocolonialisme machiavélique, inéquitable et ravageur qui maintient les pays cibles dans un état de dépendance et de pauvreté.
Vous avez résolument pris un chemin difficile, mais noble, celui de l’indépendance vraie, non de celle de façade. J’admire l’homme déterminé, pugnace et courageux que vous êtes. Mais que pouviez-vous faire face à ce complot, cette coalition dirigée contre vous dès votre élection de 2000 et dont la première offensive a été menée en 2002 ?
Vous avez réussi à résister pendant huit années de guerre anti-Gbagbo, pendant lesquelles vous ne pouviez pas gouverner correctement. L’accord de Linas-Marcoussis a été le deuxième acte, après le coup d’État raté de 2002, de votre élimination. L’élection présidentielle de fin 2010, qui ne pouvait pas bien se dérouler étant donné le contexte, en a été le troisième.
Sachez, Monsieur le Président, que je ne suis pas du tout convaincu que vous avez perdu cette élection. Je sais que les fraudes et autres irrégularités de toutes natures de la part de vos opposants ont dépassé l’entendement et que la soi-disant Commission électorale indépendante était tout sauf indépendante. Vous avez demandé un recomptage des voix et l’on vous a bombardé.
Vous êtes, j’en suis intimement convaincu, victime d’un complot international qui vous a conduit dans cette situation scandaleuse.
Heureusement, une résistance s’est organisée, en Côte d’Ivoire et à l’étranger ; cette résistance est extrêmement déterminée et ne lâchera pas, j’en suis persuadé. Recevez, Monsieur le Président, mes salutations très distinguées et respectueuses.
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