Le ministre ivoirien de la défense vient d‘attribuer à Score Technologies un marché à 25 millions de dollars pour surveiller la frontière nord de la Côte d‘Ivoire contre les attaques de groupes armés. Une décision prise aux dépens du français Thales.
Amertume dans les rangs des équipes Afrique de Thales. Alors que le géant français de l‘électronique de défense était pressenti pour fournir ses solutions de surveillance des frontières nord de la Côte d‘Ivoire, le ministre ivoirien de la défense Téné Birahima Ouattara, frère du président, a, contre toute attente, jeté son dévolu sur un système proposé par la société américaine Score Technologies. La décision a été prise la semaine du 13 septembre dans le cadre d‘un marché direct d‘une valeur de 25 millions de dollars, pour lequel l‘Etat ivoirien a déjà versé un premier acompte.
L‘offre de Thales se concentrait sur la coordination de divers moyens de surveillance pour prévenir les attaques des groupes armés qui essaiment sur la COTE D‘IVOIRE : Téné Birahima Ouattara snobe Thales au profit de l‘américain Score Technologies
frontière entre la Côte d’Ivoire et le Burkina Faso. Face à lui, le chinois Huawei avait également soumis une offre, fort de la profonde implantation de la société en Côte d‘Ivoire dans le domaine des télécommunications civiles (AI du 06/07/21).
Lacina Koné, artisan du succès américain
Le virage américain d‘Abidjan a piqué au vif Paris, qui soutenait activement la proposition de Thales, d‘autant plus que Score Technologies ne dispose pas de la moindre référence militaire en Afrique pour le moment. La firme, qui se concentre sur des analyses de spectre radio et la collecte de données pour les sociétés de télécoms et les autorités de régulation, devrait installer, dans le cadre de ce contrat de protection des frontières, des boîtiers de type RFeye conçus par CRFS, une autre société américaine.
Score Technologies a été introduit en Côte d‘Ivoire par Lacina Koné, directeur de Smart Africa, une organisation basée au Rwanda et regroupant plus d‘une trentaine de pays africains visant à accélérer l‘accès au haut débit et l‘utilisation des technologies de l‘information sur le continent. De 2011 à 2019, Lacina Koné a surtout occupé le poste de conseiller présidentiel d‘Alassane Ouattara en charge des NTIC. Mais c’est aux Etats–Unis où il a travaillé pendant plus de quinze ans, au sein notamment de la société de télécommunications Intelsat et du cabinet de conseil Booz Allen Hamilton, que Lacina Koné a noué ses premiers contacts avec Score Technologies. Contacté, l‘intéressé n‘a pas répondu aux sollicitations d‘Africa Intelligence.
Le trio mandaté par Ouattara pour reprendre en main le parti présidentiel RHDP
Alerte publiée le 23/09/21 à 9h30 – Tandis que les relations entre le directeur exécutif du RHDP, Adama Bictogo, et le premier ministre ivoirien Patrick Achi se sont nettement dégradées ces dernières semaines, Alassane Ouattara intervient en créant un « comité de restructuration« , dirigé par trois de ses fidèles, afin de reprendre en main la formation présidentielle. Une nouvelle structure qui acte la mise à l‘écart de Bictogo.
Le bruit courait depuis une semaine parmi les barons du parti présidentiel. C‘est désormais quasi–chose faite : Alassane Ouattara va remanier dans les tout prochains jours l‘organisation de son parti, le Rassemblement des houphouëtistes pour la démocratie et la paix (RHDP). Le chef de l‘Etat ivoirien l‘a annoncé à son gouvernement lors du conseil des ministres du 22 septembre.
Pour ce faire, le président a opté pour la création d‘un comité de restructuration du parti composé d‘un trio de fidèles. Selon les informations d‘Africa Intelligence, cet organe sera présidé par le ministre conseiller d‘Alassane Ouattara, Gilbert Kafana Koné. Ce dernier sera assisté d‘Ali Coulibaly, ancien ministre des affaires étrangères et fidèle du chef de l‘Etat, ainsi que d‘Ibrahim Cissé Bacongo, le ministre conseiller à la présidence.
Bictogo bridé, Achi renforcé
Ce comité sonne de facto la dissolution des organes existants du RHDP et la mise à l‘écart de son directeur exécutif, Adama Bictogo. Comme révélé par Africa Intelligence, le premier ministre Patrick Achi s‘était plaint ces dernières semaines
COTE D‘IVOIRE: Le trio mandaté par Ouattara pour reprendre en main le parti présidentiel RHDP
AFRICA INTELLIGENCE
de la « trop grande influence » de Bictogo sur le gouvernement (AI du 14/09/21). En cause notamment : des réunions organisées par le directeur exécutif du RHDP au siège du parti avec plusieurs ministres.
Le nouvel organigramme du RHDP devrait ainsi permettre de consolider l‘assise du premier ministre sur l‘exécutif. Alassane Ouattara n‘a en revanche pas souhaité nommer Achi ni même des membres de son gouvernement sein du comité. Il a ainsi opté pour des personnalités de son propre cabinet, plus disponibles selon lui pour se pencher sur les affaires du parti que les membres du gouvernement.
Qui de Karpowership ou d‘Aggreko fournira la future centrale thermique « de réserve » ?
Les autorités ivoiriennes viennent de trancher entre la solution offshore du groupe turc Karpowership et l‘option onshore du britannique Aggreko pour la construction d‘une centrale thermique.
Le contrat pour la mise en place d‘une centrale thermique « de réserve » de 200 MW en Côte d‘Ivoire vient d‘être attribué. Selon nos informations, le groupe turc spécialisé dans la construction thermique flottante Karpowership a remporté l‘appel d‘offres lancé en juin, damant le pion au favori britannique Aggreko, qui proposait une solution de centrale « à terre« .
Karpowership a pu compter sur le lobbying actif de son vice–président Ali Hjaiej pour remporter ce projet, imaginé en urgence par les autorités ivoiriennes afin de répondre à la pénurie d‘électricité qui a lourdement handicapé le pays entre mars et juillet 2021. Des négociations doivent encore avoir lieu pour régler les contours financiers du projet avant son « closing » (étape finale d‘une opération avec la signature par l‘ensemble des participants et le décaissement des fonds).
Aggreko s‘incline
Le groupe turc s‘est imposé face à un concurrent pourtant bien connecté et bien implanté en Côte d‘Ivoire : Aggreko opère déjà depuis 2010 la centrale à gaz de Vridi, en périphérie d‘Abidjan, installée à l‘époque pour pallier les problèmes de maintenance que rencontrait Azito (AI du 25/01/11). Dirigée par Christophe Jacquin, la firme dispose d‘un réseau solide au sein du parti présidentiel au pouvoir Rassemblement des houphouëtistes pour la démocratie et la paix (RHDP). Le directeur général d‘Aggreko, Abdoul Hien, est proche du directeur général de l‘énergie au ministère du pétrole Sabati Cissé, ainsi que d‘Amidou Traoré, l‘ancien directeur général de CI–Energies, l‘entreprise publique qui gère le secteur électricité.
Comme nous l‘avions révélé (AI du 30/06/21), le ministre de l‘énergie Thomas Camara avait invité plusieurs poids lourds du secteur à déposer des offres, notamment Siemens Energy et Endeavor Energy. L‘émirati Altaaqa Global Energy Services (filiale du groupe saoudien Zahid Group) n‘a finalement pas participé. Il pourrait cependant se positionner sur un autre projet – encore à l‘étude – de centrale de 50 MW.
L‘appel d‘offres pour cette centrale est adossé à un contrat de fournitures de gaz naturel liquéfié (GNL) pour lequel la major française TotalEnergies, le groupe anglo–norvégien Golar LNG, les Nigérians de Sahara Energy et les Finlandais de Wärtsilä ont été sollicités.
Jean-Claude Soumah, filleul d‘Houphouët et poisson–pilote du chinois Sinohydro
Le géant chinois de l’ingénierie et du BTP, déjà bien implanté en Côte d‘Ivoire, se développe au Burkina voisin grâce à l‘entregent de l‘homme d‘affaires ivoirien Arnaud Jean–Claude Soumah.
Déjà titulaire du contrat de construction de la tour de contrôle du futur aéroport de Ouagadougou–Donsin (AI du 16/03/21), Sinohydro finalise actuellement deux nouveaux contrats avec le gouvernement de Roch Marc Christian Kaboré : le premier, en négociation depuis plus d‘un an et d‘une valeur de 290 millions d‘euros, porte sur la construction de 10 000 logements à Ouagadougou et Bobo Dioulasso (AI du 08/01/20), tandis que le second concerne cinq centrales solaires d‘une capacité totale de 100 MW et est évalué à 125,2 millions d‘euros.
Pour faire avancer ces deux dossiers, le responsable Afrique de l‘Ouest de Sinohydro, Wang Xiaotao, s‘est rendu cet été à Ouagadougou et a rencontré les ministres burkinabès Edith Clémence Yaka (budget), Bénéwendé Sankara (habitat) et Bachir Ismael Ouédraogo (énergie). Le dirigeant chinois était accompagné de l‘homme d‘affaires ivoirien Arnaud Jean–Claude Soumah, qui lui sert depuis plusieurs années de poisson–pilote dans la sous–région. Fondateur et patron de la compagnie Sift Ivoire, Arnaud Jean–Claude Soumah est le filleul de l‘ancien président ivoirien Félix Houphouët–Boigny, qui appréciait sa faconde, et a des entrées dans plusieurs palais africains. Sur les contrats burkinabès de Sinohydro, sa société Sift Ivoire est directement associée au géant chinois.
La conclusion des contrats au Burkina Faso a une signification particulière pour le groupe, contrôlé par l‘Etat chinois. Jusqu‘en 2018, le pays était en effet l‘un des soutiens de Taïwan les plus actifs en Afrique, avant que Roch Kaboré ne change d‘allégeance et ne reconnaisse Pékin. A ce jour, cette victoire diplomatique n‘a généré que de modestes bénéfices industriels et commerciaux pour la Chine, qui travaille depuis plusieurs années à consolider l‘emprise de ses entreprises dans le pays malgré l‘insécurité persistante qui y règne.
AI