L’OQTF visant l’acteur Abou Sangaré «reste juridiquement en vigueur», selon la préfecture de la Somme.
À tout juste 15 ans, il a connu l’exil, il a traversé le Sahara, il a été emprisonné dans des conditions de vie inhumaines en Libye avant d’être primé au Festival de Cannes pour son rôle dans L’Histoire de Souleymane. Cette histoire, c’est la vie d’Abou Sangare. Le Guinéen de 23 ans s’est révélé au cinéma dans le film L’Histoire de Souleymane, primé à Cannes.
La situation administrative d’Abou Sangaré suscite des remous. Ce Guinéen de 23 ans, arrivé à Amiens en 2018 à l’âge de 16 ans, s’est révélé au cinéma dans le dernier film de Boris Lojkine, L’Histoire de Souleymane , récompensé au Festival de Cannes par le prix du meilleur acteur et le prix du jury dans la catégorie «Un certain regard».
Ce jeudi 10 octobre, l’acteur indiquait à M6 puis au Courrier Picard qu’il n’était plus sous le coup immédiat d’une obligation de quitter le territoire français (OQTF). Une information, reprise par d’autres médias, que la préfecture de la Somme dément.
Trois refus de titre de séjour
«Suite aux articles de presse parus ce jour sur la situation de M. Abou Sangaré, la préfecture précise que son OQTF, validée par le tribunal administratif d’Amiens en juillet dernier, reste juridiquement en vigueur», indique la préfecture de la Somme au Figaro.
«Le récépissé délivré ce jour atteste que la préfecture a enregistré une nouvelle demande de titre de séjour qui fera l’objet d’un examen approfondi», poursuit la préfecture. Selon Le Courrier Picard, le jeune homme a déjà essuyé trois refus de titre de séjour dans le passé.
Car le jeune homme est bien sous le coup d’une obligation de quitter le territoire français, une OQTF. La préfecture a d’ailleurs rappelé que celle-ci OQTF a été « validée par le tribunal administratif d’Amiens en juillet dernier » et qu’elle demeure « juridiquement » en vigueur.
En gros, donc, si Abou Sangaré se fait contrôler dans la rue, les policiers peuvent le conduire directement en centre de rétention en vue de son expulsion. Pour autant, le préfet affirme que la nouvelle demande du jeune homme « fera l’objet d’un examen approfondi » sans s’avancer sur l’issue de cet examen.
De nombreuses mains tendues
À Amiens, de nombreuses personnes l’ont aidé. Grâce au travail des associations, il apprend à lire et à écrire. « elles m’ont aidé à m’inscrire en seconde, en bac pro maintenance des véhicules poids lourd, et j’ai obtenu mon bac dans ce domaine » raconte-t-il sur France Inter. Son rêve ? Devenir mécanicien. Diplômé, il tente de poursuivre sa formation en apprentissage, mais est contraint d’abandonner faute de régularisation.
Ne disposant pas de d’acte de naissance, il peine à se faire reconnaître comme enfant mineur. Lorsqu’il passe enfin un test osseux pour déterminer son âge, il a déjà 18 ans. Ses demandes de régularisation sont refusées les unes après les autres.
En 2023, alors qu’il travaille comme bénévole dans l’association d’aide aux migrants on lui rapporte l’information qu’une équipe de cinéma recherche un Guinéen. S’ensuit la rencontre avec Boris Lojkine, le tournage du film, et le prix à Cannes. Pour le réalisateur Boris Lojkine, le film sera terminé quand Abou Sangaré aura ses papiers : « Quand on prend quelqu’un qui n’appartient pas au cinéma et qu’on le fait venir dans un projet de film, c’est une histoire merveilleuse mais c’est aussi une grosse responsabilité », évoque Boris Lojkine sur le plateau de C à vous.
Mettre en lumière des histoires normalement ignorées
« L’Histoire de Souleymane » et conjointement celle d’Abou Sangaré, mettent en lumière des histoires souvent ignorées. « Je trouve très malheureux que certains exploitent un fait divers pour tenir un discours négatif sur l’immigration, explique-t-il dans une interview accordée au Parisien. Le film entend mettre des histoires, des visages et de l’humain dans des discussions souvent trop abstraites ».
Si ce film a été une opportunité unique pour le jeune guinéen de 23 ans, il reste fidèle à lui-même. « Mon rêve, c’est de rendre à tous les gens d’Amiens au moins une partie de ce qu’ils m’ont donné, c’est de pouvoir entrer dans l’entreprise qui me propose du travail. » conclut-il auprès de Libération.
Jean Moliere.
Leave feedback about this