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La Mauritanie en pole position sur le marché mondial de l’hydrogène vert

La voie vers l’avenir prometteur du gaz naturel et de l’hydrogène vert de la Mauritanie

La décarbonisation pourrait offrir des opportunités au secteur énergétique mauritanien, mais celui-ci doit être soutenu par une bonne gouvernance.

Avec des potentialités jugées prometteuses, la Mauritanie va s’approprier 1,5 % du marché mondial de l’hydrogène vert d’ici 2050, selon la plateforme énergétique MSGBC. Le pays poursuit cet objectif grâce à des projets à grande échelle qui produiront 12,5 millions de tonnes d’hydrogène vert par an d’ici 2035, indique-t-elle.

Les systèmes énergétiques mondiaux sont en pleine mutation. Alors que les pays intensifient leurs efforts pour atteindre les objectifs climatiques, beaucoup cherchent à développer des sources d’énergie alternatives et renouvelables pour compenser la baisse anticipée de la demande de combustibles fossiles à long terme. Certains gouvernements misent gros sur le gaz naturel, qui émet beaucoup moins de CO2 que les autres combustibles fossiles plus polluants et dont la demande devrait croître. L’hydrogène vert – produit par l’extraction de l’hydrogène à partir de molécules d’eau avec de l’électricité renouvelable – fait également l’objet d’un intérêt et d’investissements croissants.

Les tendances mondiales vers la décarbonisation et les préoccupations en matière de sécurité énergétique pourraient rapporter gros à des pays comme la Mauritanie, où le gaz naturel et l’hydrogène vert pourraient constituer de nouvelles sources de revenus pour le gouvernement. Mais la croissance de ces secteurs doit être soutenue par une bonne gouvernance.

Un nouveau rapport, commandé par l’ITIE Mauritanie et préparé par CrossBoundary avec le financement de USAID, se penche sur ce que le développement des secteurs du gaz et de l’hydrogène vert du pays pourrait signifier pour les revenus du gouvernement selon divers scénarios de prix, et il fournit des recommandations visant à garantir que ces secteurs en plein essor sont gérés de manière responsable.

Le gaz de la Mauritanie pourrait en faire un partenaire énergétique au niveau mondial

Compte tenu de sa proximité avec l’Europe, la Mauritanie est stratégiquement placée pour devenir un important fournisseur de gaz naturel, d’autant plus que les pays cherchent à diversifier leurs approvisionnements en gaz pour réduire leur dépendance à l’égard du gaz russe. La Mauritanie devrait devenir exportateur de gaz en 2023, avec l’achèvement de la phase I du projet de gaz de Grand Tortue Ahmeyim (GTA) mené par BP et Kosmos Energy. Dans le cadre de ce projet conjoint, les gouvernements du Sénégal et de la Mauritanie détiennent des participations par l’intermédiaire de leurs entreprises d’État Petrosen et SMH.

Devenir exportateur de gaz grâce au projet de GTA pourrait augmenter les revenus publics de la Mauritanie et positionner le pays comme un nouvel acteur sur les marchés mondiaux de l’énergie, d’autant plus que la demande de gaz augmente. Le projet de GTA a une capacité de production annuelle de 2,45 millions de tonnes et l’on estime qu’il générera jusqu’à 150 millions de dollars par an, après le recouvrement des coûts d’investissement. Le champ de gaz de Bir Allah, actuellement à son stade de faisabilité, pourrait générer des rendements encore plus élevés.

Recettes publiques annuelles potentielles du project Grand Tortue Aymehim (Source : CrossBoundary)
Source : Calculs de CrossBoundary, basés sur des données rapportées par MREITI.

Pourtant, le secteur du gaz de la Mauritanie n’en est encore qu’à ses débuts, et le projet GTA devra être étendu pour que le pays puisse émerger comme un pôle mondial de gaz naturel liquéfié (GNL) et en tirer pleinement les avantages. Compte tenu de l’imprévisibilité des marchés et des prix de l’énergie, il sera important que le pays adopte des politiques budgétaires prudentes pour gérer ses revenus pétroliers et gaziers. Dans ce contexte, les rapports ITIE peuvent être un outil essentiel pour informer le débat et établir des attentes réalistes quant à l’impact des revenus du gaz sur les finances publiques.

L’entrée de la Mauritanie dans le secteur de l’hydrogène vert

En 2020, le pays a adopté une stratégie nationale pour transformer son secteur énergétique, et il vise à porter la part de l’énergie renouvelable dans son mix énergétique à 60 % d’ici 2030. Dotée d’abondantes ressources solaires et éoliennes, les perspectives d’énergies renouvelables pourraient faire de la Mauritanie un important producteur d’hydrogène vert. À cette fin, le gouvernement a manifesté sa volonté de développer un secteur de l’hydrogène vert, comme en témoigne tout récemment le protocole d’accord qu’il a signé avec BP à la COP27. L’accord pourrait aboutir à un projet générant une production annuelle de 2 millions de tonnes d’hydrogène vert.

La demande en hydrogène vert devrait augmenter du fait des efforts visant à décarboner la production d’hydrogène et de minerais. En tant que gros producteur de minerai de fer et de cuivre, la Mauritanie pourrait à terme créer un marché intérieur pour l’hydrogène vert alors qu’elle cherche à décarboner son secteur minier.

Ce protocole d’accord vient s’ajouter à deux grands projets d’hydrogène vert proposés par des développeurs internationaux et qui sont en phase de préfaisabilité. Selon le rapport, ces projets – proposés par CWP Global et Chariot Ltd, rejoint par TotalEnergies – nécessiteront un investissement estimé à 60 milliards de dollars. Malgré ces annonces, l’industrie de l’hydrogène vert reste soumise à des défis techniques ainsi qu’aux incertitudes liées à sa compétitivité en termes de coûts par rapport à d’autres technologies propres, ce qui pourrait limiter la contribution potentielle du secteur à l’économie du pays. Le rapport met en évidence les principaux facteurs de rentabilité du secteur, mais il considère qu’il est prématuré d’estimer les revenus potentiels que le gouvernement pourrait attendre de l’hydrogène vert, car le secteur n’est encore qu’à ses débuts.

Source : CrossBoundary, basé sur bp Energy Outlook 2022.

Pour capitaliser pleinement sur le potentiel de transition énergétique de la Mauritanie, la mise en place d’une filière de l’hydrogène vert devra s’accompagner de cadres institutionnel et réglementaire spécifiques au secteur. Bien que la mise en œuvre de l’ITIE se concentre généralement sur les industries extractives, certains pays ont élargi sa portée pour inclure d’autres secteurs, dont celui des énergies renouvelables. Compte tenu de l’ampleur des investissements proposés, la Mauritanie pourrait tirer parti de l’ITIE pour améliorer la supervision des projets d’hydrogène vert, notamment par la publication des contrats, des procedures d’octroi de licences, des bénéficiaires effectifs, des cadres réglementaires et des flux de revenus. Cela pourrait contribuer à renforcer la redevabilité, à garantir la mise en place de mesures de protection contre la corruption et à créer un climat d’investissement plus favorable.

Le gouvernement mauritanien élabore actuellement le cadre juridique et réglementaire requis avec le soutien de partenaires internationaux tels que l’Unité de soutien de CONNEX et l’Union européenne. Ces efforts concertés marquent les premières étapes vers le développement d’un secteur de l’hydrogène vert durable et bien gouverné.

La Mauritanie vise à devenir une plaque tournante régionale pour les exportations d’énergie et les industries de fer à faible teneur en carbone d’ici 2040, et a adopté une approche holistique de son secteur énergétique, incluant le gaz et les énergies renouvelables dans une stratégie commune. Les conclusions du rapport et la modélisation financière constituent une base importante pour un débat fondé sur des données probantes, alors que la Mauritanie cherche à diversifier son secteur énergétique. Pour aider le pays à réaliser son potentiel de gaz et d’hydrogène vert, la plateforme multipartite de l’ITIE peut fournir un espace précieux de dialogue et gouvernance, au moment où la Mauritanie affronte la complexité d’un paysage énergétique mondiale en constante évolution. Pour l’avenir, la Mauritanie gagnerait à lier sa mise en œuvre de l’ITIE à ces politiques afin de soutenir les priorités nationales.

Jean Moliere source EITI

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