9 février 2025
Paris - France
CULTURE

La champeta colombienne, fille du soukous

La champeta, également connue sous le nom de terapia, est un genre musical et une danse qui a vu le jour sur la côte caraïbe de la Colombie au début des années 1980. Elle s’est développée à partir d’un style antérieur appelé chalusonga, qui est né à Palenque de San Basilio au milieu des années 1970.

La champeta , également connue sous le nom de terapia , est un genre musical et une danse originaire de la côte caraïbe de la Colombie au début des années 1980. Elle s’est développée à partir d’un style antérieur appelé chalusonga , originaire de Palenque de San Basilio au milieu des années 1970. La chalusonga était une combinaison de chalupa colombienne et de musique percussive afro-cubaine popularisée par Estrellas del Caribe.  Lorsque leur musique a atteint Cartagena de Indias , elle a évolué vers la champeta, qui est devenue un mouvement et une identité parmi les Afro-Colombiens. Elle montre des influences des colonies coloniales africaines et de la culture africaine contemporaine, en particulier de la République démocratique du Congo . 

Caractéristiques musicales

Dans la musique champeta, la base rythmique domine les lignes mélodiques et harmoniques, produisant une musique facile à danser et marquée par sa force et sa plasticité. Les instruments utilisés comprennent la voix, les percussions, la guitare électrique, la basse, les congas et le synthétiseur, qui apporte des effets rythmiques. Cette forme musicale se caractérise par une division en trois parties séquentielles : la musique d’introduction, le refrain et le Despeluque , marqué par des rythmes répétitifs puissants et généralement accompagnés de placas , des interruptions à contre-courant du rythme. Les paroles des chansons affichent souvent l’attitude rebelle des habitants de Carthagène d’origine africaine, défiant l’exclusion sociale et économique ou racontant leurs rêves de changement et de progrès.

Aspects culturels

La conception standard de la champeta comprend quatre aspects centraux : l’expression musicale, le langage distinctif, les haut-parleurs ( picós ) et les perreos (célébrations). Certains accordent une importance égale à d’autres aspects tels que la danse, l’activisme politique, le costume ou les vidéos. Plus récemment, ce phénomène culturel s’est étendu à d’autres formes d’art comme le cinéma, la littérature et les arts plastiques.

En Colombie, il existe de nombreuses discothèques où les gens peuvent danser au son de la musique champeta.

À Carthagène des Indes , dans le quartier de Bazurto, il y a un endroit appelé Bazurto Social Club, à côté du parc Centenario, où des groupes de musique jouent de la champeta en direct près des murs colorés qui se rapportent à l’histoire de Carthagène. 

À Bogotá , dans la zone rose , il y a un bar populaire appelé Campanario, où un groupe de musique joue en direct tous les rythmes tropicaux tels que la champeta, le reggaeton, le reggae et même le calypso. 

Depuis le mardi 14 décembre 2021, la rumba est inscrite au patrimoine culturel immatériel de l’Unesco. Cette danse avait quitté le Kongo sous le nom de nkumba pour revenir plusieurs siècles plus tard au Congo sous l’appellation de rumba. Mais au-delà de sa reconnaissance, cette musique congolaise n’est pas la seule qui avait fait un voyage par-delà les mers.

Le soukous, une variante de cette même rumba avait traversé l’Atlantique pour s’implanter dans une lointaine terre latine qui s’appelle la Colombie. Les Afro-colombiens ont puisé dans la musique congolaise les éléments nécessaires pour créer la champeta.

Depuis la nuit des temps, les rythmes musicaux voyagent comme le vent. Ils s’exilent, s’exportent, s’importent à l’emporte-pièce. Si la rumba avait fait un retour remarqué aux sources pour redynamiser l’art d’Orphée au pays de ses ancêtres, le soukous n’était pas en reste. Il était parti s’implanter le moment venu dans les lointaines contrées de la Colombie. Contrairement à la rumba dont la toponymie dérive du kikongo « nkumba » (nombril) qui l’avait engendrée, le soukous avait dans ce paysage culturel complètement changé de nom en devenant la ″champeta″. Ce terme était souvent utilisé d’une manière désobligeante pour s’adresser aux personnes d’ascendance africaine, gens de petites fortunes qui vivaient dans les quartiers éloignés du centre de l’héroïque Carthagène. Pour les uns, il tire son origine de champa″, sorte de machette utilisée dans les champs et qui symbolise le travail. Pour les autres, ce mot vient du terme “champetudo”, autrefois appliqué aux descendants d’Africains pour exprimer la désapprobation de leur culture et de leurs traditions. Cette raison avait fait que la champeta qui est une danse chaude, sensuelle et explosive, soit méprisée par la classe moyenne colombienne parce que considérée comme la musique des voyous et des marginaux.

C’était dans les valises des marins ouest-africains que le soukous, musique-phare à  Kinshasa et Brazzaville, débarqua dans les années 70 dans la ville portuaire de Cartagena de Indias (Carthagène en français) avant de s’étendre dans toute la Caraïbe colombienne. Carthagène fut un centre négrier de grande importance qui avait joué un rôle clé dans la déportation des Noirs. C’est l’Afrique de la Colombie. Beaucoup d’esclaves des îles caribéennes étaient arrivés par là. Autrefois capitale de l’esclavage, la ville est aujourd’hui devenue la capitale de la champeta. Cette danse est issue des rythmes des quartiers populaires de la Caraïbe colombienne. Partie de Carthagène, elle avait atteint Palenque de San Basilio, un village d’affranchis créé par les esclaves marrons qui avaient réussi à se libérer de leurs maîtres au XVIIe siècle. Par le décret royal du roi d’Espagne en 1713, Palenque était le premier ″pueblo″ (ville) noir libre d’Amérique latine.

Considérée d’abord comme une musique folklorique, la champeta est aujourd’hui devenue un vrai phénomène culturel de la côte colombienne. Elle s’est même étendue à d’autres régions particulièrement Barranquilla et Santa Marta. Fortement inspirée de la ″musica africana″, la champeta qui est surtout faite pour être dansée, est un mélange de juju nigérian, du highlife ghanéen et surtout des rythmes congolais particulièrement le soukous et la rumba. Elle se danse seul ou à deux et de façon très sensuelle. C’est la danse de la séduction. Les Colombiens eux-mêmes ne distinguent pas spécialement ces musiques les unes des autres, et ne savent pas précisément de quel pays elles viennent. La champeta a toujours emballé les festivaliers et les carnavaliers sur la côte caraïbe de la Colombie.

Lorsqu’elle est dansée, la champeta compte plusieurs dizaines de pas qui imitent essentiellement certaines actions. L’un des pas les plus emblématiques est “el caballito” (le petit cheval) où l’on imite le mouvement de l’équidé. Il y a aussi l’agrafe où la cavalière soulève une jambe et l’accroche à la taille de son partenaire; le lit où l’homme écarte les jambes pour permettre à sa cavalière de passer en-dessous et la vis. Dans la champeta, la cadence rythmique l’emporte sur les lignes mélodiques car la partie chantée n’intéresse nullement les Colombiens. Celle appelée “despeluque“ (sebene au Congo) est la plus prisée puisque c’est la partie de la chanson qui invite à la danse sous l’accompagnement saccadé des guitares.

Les paroles dans la champeta racontaient autrefois le quotidien des Afro-Colombiens, faisaient souvent référence à la politique, aux problèmes sociaux et à un ardent désir de changement. Ainsi, elle était considérée comme une menace pour le gouvernement. Cette musique avait aussi été victime de discrimination pour son expression sexuelle que certains trouvaient vulgaire. La champeta est pour les Afro-Colombiens à la fois cette musique, cette danse, cet art et ce style de vie qu’ils utilisent pour manifester et célébrer leur africanité. La chanteuse Shakira lui avait donné une dimension mondiale lors de sa prestation au show du Super Bowl 2020.

La ville de Carthagène a accueilli bien des artistes-musiciens congolais notamment Mbilia Bel, Kanda Bongo et Dizzy Mandjeku. Mais c’est surtout Bopol Mansiamina, Lokasa ya Mbongo et son Soukous Star qui y ont laissé une empreinte indélébile. Parmi les représentants locaux de cette musique, on peut citer Ane Swing (qui a beaucoup fait pour sa diffusion et sa reconnaissance nationale) et Elio Boom.

Les latinos sont connus pour leur qualité de danseur et les colombiens ne font pas exception à la règle. La salsa et la cumbia font partie de leur ADN. Plus qu’un moyen d’expression culturelle, la danse, qu’elle soit traditionnelle ou contemporaine, est un art de vivre.

Salsa

Cali est célèbre pour être la capitale de la salsa. Cette danse latine connue dans le monde entier est souvent associée à Cuba ou à Puerto Rico. Pourtant on sous-estime l’influence colombienne dans les rythmes de la salsa. Les gagnants de la Fédération Mondiale de Salsa à Miami sont souvent des colombiens. Il est impensable pour un Colombien de ne pas connaître quelques pas de salsa ou du moins avoir un certain sens du rythme.

Salsa choke

La salsa choke trouve ses origines dans la salsa traditionnelle et la musique urbaine. Elle apparaît sur la côte Pacifique et s’inspire des rythmes africains. C’est plus qu’une simple salsa modernisée, c’est une salsa avec plus de caractère. Elle arrive rapidement à Cali et y est accueillie à bras ouverts. Les chansons qui ont contribué à l’essor de la Salsa Choke sont Chikoki, La Tusa ou encore Bien Pegaito. Cette danse continue à s’expandre grâce aux nouveaux artistes qui ont adopté ce rythme.

Cumbia

La Cumbia trouve ses origines chez les esclaves, qui,prisonniers de leurs chaînes et boulets aux pieds, dansaient aux son des percussions. Née de rythmes africains et empreinte du style colonial espagnol, la cumbia est aujourd’hui la danse nationale, la danse de l’amour. C’est dans les années 1940 que la cumbia se modernise et s’étend à toute l’Amérique Latine. Elle fait aujourd’hui partie du patrimoine culturel immatériel de la Colombie et c’est une danse qui rythme les folles nuits du pays.

Merengue

Initialement originaire de République Dominicaine, le merengue est aujourd’hui un style musical connu dans toute l’Amérique Latine. Le merengue est inscrit au Patrimoine Culturel Immatériel de l’Humanité à l’Unesco depuis novembre 2016. Construit autour des instruments à cordes, de la güira et des percussions, les rythmes mélodieux du merengue sont proches de la salsa. Ces trois instruments sont la parfaite synthèse de la culture dominicaine : européenne, aborigène et africaine.

Champeta

La champeta est une danse qui vient de la Côte Caribéenne et qui est fortement inspirée des rythmes africains. Ce genre musical est devenu un phénomène social dans les rues de Carthagènes des Indes. La champeta se danse seul ou à deux et de façon très sensuelle. C’est la danse de la séduction.

Vallenato

La musique vallenata ou le vallenato, aujourd’hui très répandue dans les Caraïbes, est en réalité apparue sur la péninsule de la Guajira. La présence de l’accordéon (vestige des colonies allemandes de Riohacha) et l’influence de la culture ibérique lui donne des airs de musique européenne. La guacharaca indigène et les percussions africaines rappellent les rythmes traditionnels des danses colombiennes. Aujourd’hui le vallenato est populaire dans tous les pays d’Amérique Latine. En 2015, il est inscrit au Patrimoine Culturel Immatériel de l’Humanité à l’Unesco.

Venez découvrir la Colombie, ses paysages, ses habitants et surtout ses rythmes connus dans le monde entier. En Colombie, la danse est plus que culturelle, c’est un art de vivre.

Jean  Moliere 

Sources

  1.  Vega, Luis Daniel (30 août 2016). »Estrellas del Caribe : La champeta criolla de San Basilio de Palenque ».Radio Nacional de Colombie(en espagnol). Récupéré le 10 décembre 2020.
  2. ^Aller jusqu’à :un b Contreras Hernández, 2002
  3. ^ Escallón Miranda, 2007
  4. ^ Zuleta, Mélissa (12 octobre 2014). « La deuxième fois de la champeta est arrivée pour quedarse » . EL HERALDO (en espagnol). El Heraldo.
  5. ^ Article de This Is Cartagena sur les bars musicaux de Carthagène, le Bazurto Social Club
  6. ^ Article de Vive In sur Campanario
  7. ^ Article de Lena Hansen sur un concert de Carlos Vives, publié à l’origine dans le Miami Herald

 

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