« Déterminé ». Tidjane Thiam, élu en décembre 2023 à la tête du Parti démocratique de Côte d’Ivoire (PDCI), principal parti d’opposition du pays, doit désormais faire face à l’expression des ambitions de quelques-uns de ses « alliés ». Au premier rang de ces cadres qui entendent bien continuer à faire entendre leurs voix : Jean-Louis Billon. L’ancien ministre du Commerce affiche en effet clairement ses ambitions, se disant « déterminé » à briguer la présidence lors de l’élection de 2025.
Crispations. Alors que le parti vient seulement de terminer la longue séquence consacrée aux obsèques de feu Henri Konan Bédié, le bras de fer qui oppose les deux hommes ravive les crispations au sein du PDCI, nous explique Alain Aka dans le « Match de la semaine » consacré à ce duel entre « frères ennemis ». Certains, en interne, s’inquiètent de voir voler en éclats le fragile équilibre que l’ancien président du parti était parvenu à maintenir. À un an d’une échéance électorale cruciale, une éventuelle « guerre des chefs » constituerait un handicap sérieux pour le PDCI.
Un an après le décès d’Henri Konan Bédié, la levée de deuil organisée à Pépressou s’est déroulée sans le nouveau président du PDCI, Tidjane Thiam. Ce dont n’a pas manqué de se saisir son rival, Jean–Louis Billon.
Bien qu’il ait fait organiser des messes commémoratives dans plusieurs lieux, comme ici à Paris, Tidjane Thiam se voit reprocher son absence à
Le 1er août, le village natal d’Henri Konan Bédié a vibré au rythme des hommages rendus à l’ancien président ivoirien, un an jour pour jour après sa disparition.
La cérémonie a rassemblé une foule nombreuse. Une absence a particulièrement fait parler, celle de Tidjane Thiam, le successeur de Bédié à la tête du Parti démocratique de Côte d’Ivoire (PDCI). Il n’en fallait pas plus pour raviver le débat sur la rivalité latente entre l’ancien banquier et Jean–Louis Billon, qui souhaitent tous deux être le candidat du parti à la présidentielle d’octobre 2025.
Retenu aux JO de Paris
Tidjane Thiam n’a pas fait mystère de ses activités. Il se trouve à Paris afin de prendre part aux JO 2024, en sa qualité de membre du Comité international olympique (CIO). Cette fonction l’oblige à être présent dans la capitale française durant toute la compétition sportive, fait savoir un de ses proches. Il s’était donc fait représenter, à Pépressou, par une délégation conduite par le président honoraire du PDCI, Alphonse Kwassi Cowpli–Bony, et le vice–président Akossi Bendjo. Il a également fait organiser des messes commémoratives dans plusieurs localités, dont l’une à l’église Saint–Jean de Cocody, à Abidjan, et une autre à Paris, à laquelle il a personnellement assisté.
En Côte d’Ivoire, Tidjane Thiam présente son équipe en vue de la présidentielle 2025
Malgré ces dispositions, son absence a été vivement critiquée par des cadres du parti et certains observateurs politiques. Pour un député ivoirien, «quand on a des activités, on les hiérarchise. Et on a compris que sa priorité, c’étaient les JO, pas Bédié ». Geoffroy Julien Kouao, politologue et essayiste, souligne l’importance de l’événement : << Tidjane Thiam est le successeur politique de Henri Konan Bédié, la symbolique de la levée de deuil est importante dans la tradition ivoirienne. C’est le dernier hommage rendu au défunt. Il doit s’approprier les codes de la politique et surtout de la tradition pour être davantage en harmonie avec sa formation politique. >>
D’autres ont défendu la position de Thiam. Pour Ahouman Gaël Lakpa, analyste politique ivoirien : << Si les gens jasent, c’est sûrement parce qu’ils ne voulaient pas de lui à la tête du PDCI. Ils ont déjà perdu face à lui et feraient mieux de se concentrer sur 2025.>>
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Entre ouverture internationale et tradition
Dans ce contexte, la présence de Jean–Louis Billon, ancien ministre du Commerce, a donc été
particulièrement remarquée. Les images de ce cacique du PDCI tenant les mains de la veuve Henriette Konan
Bédié, ont été largement diffusées sur les réseaux sociaux par ses équipes. Le message les accompagnant «Yako maman. Je suis là et avec vous », a été perçu comme une façon pour ce rival de Tidjane Thiam de se positionner comme l’héritier spirituel de Bédié.
D’ailleurs, deux jours plus tard, le 3 août, le député de Dabakala a annoncé, une nouvelle fois, sa candidature à la présidentielle de 2025 lors d’une visite au nouveau chef du village d’Akandjé, au nord de la commune de Bingerville. En mai dernier, Jean–Louis Billon fut le parrain de son intronisation.
Présidentielle en Côte d’Ivoire : Jean–Louis Billon et Tidjane Thiam, le duel des frères ennemis
L’épisode de Pépressou a donc de nouveau mis au jour les divisions qui persistent au sein du PDCI, un peu plus de six mois après l’élection de Tidjane Thiam à la présidence
du parti. Alors que certains cadres et militants soutiennent la stratégie de modernisation et d’ouverture internationale prônée par Thiam, d’autres, à l’instar de Jean–Louis Billon, semblent privilégier une approche plus traditionnelle, ancrée dans l’héritage direct de Bédié.
Arthur Banga, maître de conférences en histoire à l’Université Félix–Houphouët–Boigny d’Abidjan, souligne l’importance de l’événement pour le parti : « C’était une occasion [pour le PDCI] de montrer qu’Henri Konan Bédié reste son référent. N’oublions pas qu’il y a encore des « bédiéistes » purs et durs, qui appréciaient peu que Thiam revendique tous les succès de [l’ancien président]. >> Au–delà des petites polémiques, l’enjeu pour le PDCI, d’ici à la présidentielle d’octobre 2025, sera de transformer ces divergences en dynamique positive. L’opposition entre Tidjane Thiam et Jean–Louis Billon pourrait d’ailleurs être le catalyseur d’un débat nécessaire sur l’orientation future du parti.
Jean Moliere. Source JA
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