9 février 2025
Paris - France
POLITIQUE

Guerre en RDC : Paris appelle les forces rwandaises à « quitter instamment » l’est du pays

Le ministre des affaires étrangères français, Jean-Noël Barrot, est arrivé jeudi à Kinshasa, capitale de la République démocratique du Congo. Il s’est ensuite rendu à Kigali, capitale rwandaise, selon le porte-parole de la diplomatie française.

Paris appelle les forces rwandaises à « quitter instamment » la République démocratique du Congo (RDC) et le groupe armé M23 à « se retirer immédiatement des territoires dont il a pris le contrôle », a affirmé, jeudi 30 janvier, le ministère des affaires étrangères, Jean-Noël Barrot. « La souveraineté et l’intégrité territoriale de la RDC ne sont pas négociables », a déclaré à la presse le porte-parole de la diplomatie française, Christophe Lemoine, alors que M. Barrot est arrivé jeudi matin à Kinshasa, capitale de la RDC. Il s’est entretenu dans la matinée avec le président, Félix Tshisekedi, avant de se rendre à Kigali, au Rwanda, où il doit rencontrer Paul Kagame.

Mercredi, le M23 a ouvert un nouveau front dans l’est de la RDC en s’emparant, selon des sources locales, des villages de Kiniezire et Mukwidja dans la province du Sud-Kivu, voisine de celle du Nord-Kivu, dont Goma est la capitale. L’ambassadeur itinérant du Rwanda pour la région des Grands Lacs, Vincent Karega, a déclaré mercredi que le M23 allait « continuer » d’avancer dans l’est de la RDC, voire bien au-delà.

Peu avant minuit mercredi, M. Tshisekedi, resté silencieux depuis le début de l’offensive, s’est adressé à la nation dans une allocution retransmise à la télévision. Reconnaissant une « aggravation sans précédent de la situation sécuritaire » dans l’Est, il a dit vouloir « rassurer » les Congolais. « Une riposte vigoureuse et coordonnée contre ces terroristes et leurs parrains est en cours », a assuré le chef d’Etat, louant des forces armées congolaises en dépit de leurs revers quasi systématiques. Condamnant « le silence » et « l’inaction » de la communauté internationale face à « la barbarie du régime de Kigali », il a mis en garde contre le risque d’« une escalade aux conséquences imprévisibles » dans la région des Grands Lacs.

M. Kagame vise l’Afrique du Sud

Jusqu’ici, les initiatives diplomatiques lancées pour tenter de régler le conflit qui dure depuis plus de trois ans n’ont rien donné. La Communauté de développement de l’Afrique australe (SADC), qui a des soldats déployés dans la région (SAMIRDC), a annoncé jeudi la tenue d’un sommet extraordinaire vendredi à Harare, au Zimbabwe. Un retrait de la SAMIRDC déployée depuis la fin de 2023 pourrait y être décidé, selon le média sud-africain Daily Maverick.

La force de paix comprend notamment 2 900 soldats sud-africains, ainsi que des militaires malawiens et tanzaniens. L’Afrique du Sud fournit également des soldats à l’autre force de maintien de la paix déployée en appui à Kinshasa, celle de l’ONU (Monusco). Les deux forces ont payé un lourd tribut aux affrontements de cette dernière semaine : dix-sept de leurs soldats, dont treize sud-africains, ont été tués.

M. Kagame a critiqué jeudi la SAMIDRC en estimant qu’elle n’est « pas une force de maintien de la paix » et n’a « pas sa place dans cette situation », dans un message publié sur X. La SAMIDRC est « engagée dans des opérations de combat pour aider le gouvernement de la RDC à lutter contre son propre peuple, en travaillant aux côtés de groupes armés génocidaires comme les FDLR qui ciblent le Rwanda », a-t-il affirmé. Il a également prévenu l’Afrique du Sud qu’il n’avait pas peur d’une « confrontation » avec elle à ce sujet.

L’est de la RDC, carrefour stratégique de la région des Grands Lacs aux confins du Rwanda et de l’Ouganda, est déchiré depuis des décennies par les violences de multiples groupes armés, exacerbées après le génocide au Rwanda, en 1994. Kinshasa accuse Kigali de vouloir piller les nombreuses richesses naturelles. Le Rwanda dément, et affirme vouloir éradiquer certains groupes armés qui sont installés et menacent, selon lui, sa sécurité en permanence, notamment les Forces démocratiques de libération du Rwanda (FDLR), créé par d’anciens responsables hutu du génocide des Tutsi. De nombreux experts de la région jugent Kigali avant tout intéressé par la juteuse exploitation des minerais de la région, dont le tantale et l’étain utilisés dans les batteries et les équipements électroniques, ou l’or.

Jeudi, alors que les combats avaient quasi complètement cessé, Goma pansait ses plaies, entre chaussées crevées par des impacts de mortiers et vitrines défoncées par les pillages. Si les combats ont peu détruit de bâtiments, la situation humanitaire reste critique dans cette ville où Internet, l’eau courante et l’électricité sont toujours coupés. Les affrontements dans la ville ont fait plus de 100 morts et près d’un millier de blessés, d’après les hôpitaux.

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