23 novembre 2025
Paris - France
AMERIQUE INTERNATIONAL

En Haïti, la situation critique de l’école aggravée par la violence des gangs

En raison de ces attaques, des déplacements de population et de la pauvreté croissante, l’UNICEF estime qu’aujourd’hui, en Haïti, un enfant sur sept n’est pas scolarisé. Et près d’un million d’autres risquent d’abandonner l’école. L’éducation n’a jamais été aussi menacée.

Manque d’électricité, absence de cantine, classes surchargées : les écoles haïtiennes souffrent de nombreuses faiblesses structurelles, exacerbées par la prolifération de bandes criminelles qui ont contraint plus de 1 600 établissements à fermer à travers le pays et paupérisé les familles.

Au total, 3,3 millions d’enfants ont désormais besoin d’une aide humanitaire, soit le chiffre le plus élevé jamais enregistré. Les cas de malnutrition aiguë, de recrutement d’enfants, de violences basées sur le genre et d’autres violations des droits de l’enfant sont en forte hausse.

« Les enfants en Haïti sont déplacés à un rythme et à une échelle alarmants », a déclaré la cheffe de l’UNICEF, Catherine Russell.

« Chaque fois qu’ils sont contraints de fuir, ils perdent non seulement leur maison, mais aussi la possibilité d’aller à l’école, d’être en sécurité et simplement d’être des enfants ».

Crise humanitaire complexe

Des séismes meurtriers à la fragilité politique et au chaos économique, des décennies de chocs ont conduit à l’une des crises humanitaires les plus complexes du monde en Haïti.

Les bandes armées contrôlent désormais plus de 85 % de la capitale, Port-au-Prince, ainsi que plusieurs routes stratégiques, isolant des familles de la nourriture, des soins de santé et de la protection, et les forçant à fuir.

Plus de 2,7 millions de personnes, dont 1,6 million de femmes et d’enfants, vivraient sous le contrôle de ces groupes armés. Le rapport avertit que l’ampleur du déplacement est sans précédent, le nombre de sites d’accueil ayant atteint 246 à l’échelle nationale au premier semestre 2025.

L’éducation prise pour cible

À Port-au-Prince et dans les zones environnantes, les écoles sont devenues des cibles ou des abris. Plus de 1.600 établissements scolaires ont fermé, tandis que 25 ont été occupés par des gangs, privant des milliers d’élèves de la possibilité d’apprendre.

Le coût de la scolarité constitue un autre obstacle majeur. Seules 15 à 20 % des écoles sont publiques, et même celles-ci exigent souvent des familles qu’elles paient les manuels et les uniformes, précise le rapport.

Une mère tient sa fille dans ses bras dans un abri de fortune installé dans une école après avoir fui les attaques des groupes armés à Port-au-Prince.
Un appel à l’action

L’UNICEF a pris en charge plus de 86.000 enfants souffrant d’émaciation, une forme de malnutrition potentiellement mortelle, et fournit des soins de santé à 117.000 personnes, ainsi que de l’eau potable à 140.000 autres.

« D’habitude, je fais sept pauses pendant la montée », souffle Luland Jean-Pierre, le directeur de l’école élémentaire Mark-Bourque, sur les hauteurs de Port-au-Prince, la capitale haïtienne. En ce lundi d’octobre, comme chaque matin, le pédagogue de 70 ans arpente le chemin, bien trop pentu et caillouteux pour être carrossable, qui mène à son petit établissement, perché au sommet du morne (colline) qui surplombe le quartier de Debussy. Depuis sa nomination, en 2018, le directeur effectue quotidiennement cette randonnée de près de 3 kilomètres dans son costume-cravate démodé, chaussures impeccablement cirées aux pieds. « Quand il pleut, on le fait aussi, dit le septuagénaire avec un sourire résigné. La seule différence, c’est qu’on ne voit pas grand-chose. »

Entourée d’arbres fruitiers, de bananiers et de touffes de plantes aux vertus médicinales autour desquelles gambadent de rustiques poules rousses, la petite école semble nichée au milieu d’un éden qui ferait presque oublier son aspect vétuste, ses salles mal éclairées et les déchets qui jonchent les sentiers. Le panorama sur le centre de Port-au-Prince et sa baie est époustouflant.

Mais l’agence reste gravement sous-financée. Sans une augmentation immédiate des ressources, des programmes essentiels risquent d’être gravement compromis.

« Les enfants d’Haïti ne peuvent plus attendre », a averti Mme Russell. « Comme tous les enfants, ils méritent de vivre en sécurité, en bonne santé et en paix. Il nous appartient d’agir maintenant pour eux ».

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