En discussions depuis plusieurs mois, le partenariat entre les autorités ivoiriennes et l‘ONG sud–africaine de conservation de la nature n‘est toujours pas effectif.
Explications.
Officiellement, African Parks Network (APN) évoque de simples « pourparlers avec les autorités ivoiriennes ». Toutefois, le parc de la Comoé, l‘une des zones protégées les plus vastes d‘Afrique de l‘Ouest avec ses 1 149 450 hectares, devrait bien voir débarquer les rangers de l‘ONG sud–africaine de conservation de la nature. Leur arrivée s‘inscrit dans le cadre d‘une convention entre les gouvernements du Bénin – où ils se sont vus confier la gestion des parcs de la Pendjari et du W, frontaliers avec le Burkina Faso et le Niger – et de la Côte d‘Ivoire.
De la RDC au Bénin, comment African Parks étend son empire
Alassane Ouattara, le chef de l‘État ivoirien, a donné son accord fin mars, mais la signature de ce partenariat, prévue en avril, a été retardée. Le projet devrait finalement être présenté en conseil des ministres dans les prochaines semaines. En cause, la dégradation de la situation sécuritaire dans le nord du Bénin, cible d‘une vingtaine d‘attaques terroristes depuis la fin de l‘année 2021. En février 2022, quatre rangers béninois ont été tués dans le parc du W, puis, début avril, trois soldats ont péri dans le parc de la Pendjari.
Dans la foulée, African Parks a, selon nos sources, demandé un délai supplémentaire à la Côte d‘Ivoire.
Tensions avec l‘Office ivoirien des parcs et réserves
Les pourparlers avec African Parks avaient été initiés par l‘ancien ministre des Eaux et forêts, Alain–Richard Donwahi. Ce dernier s‘est rendu dans le parc de la Pendjari en juin 2021. Il a ensuite rendu compte du projet au Conseil national de sécurité (CNS). Plusieurs missions de prospection ont par la suite été organisées. En octobre, une délégation d‘APN, accompagnée de représentants des ministères des Eaux et forêts et de l‘Environnement, a fait le voyage jusqu‘à Bouna, dans le nord de la Côte d‘Ivoire. Selon nos informations, elle n‘a toutefois pas été en mesure d‘accéder au parc.
Trafic de bois en Côte d‘Ivoire : l‘affaire qui a précipité la chute d‘Alain–Richard Donwahi
Officiellement, les agents de l‘Office ivoirien des parcs et réserves (OIPR) ont prétexte des problèmes de sécurité et des pistes en mauvais état. Il s‘agissait en réalité d‘un geste d‘humeur. En charge de la gestion de la Comoé, l‘OIPR voit en effet d‘un mauvais oeil l‘arrivée sur ses terres d’une entreprise privée.
Alain–Richard Donwahi envisageait également de déléguer à l‘ONG la gestion de la forêt classée de Bossématié afin d‘en faire un sanctuaire pour les éléphants. Située dans la région de l‘Indénié–Djuablin, ce massif forestier de près de 30 000 hectares a été transformé fin mars en réserve naturelle.
Privatisation de la lutte
antiterroriste
Dans le parc de la Comoé, African Parks sera officiellement chargée de créer des espaces protégés sur le modèle de ce qui a été fait dans le parc de la Pendjari. Dans les faits, les autorités ivoiriennes comptent sous–traiter à l‘ONG une partie de la gestion sécuritaire de cette zone particulièrement difficile à quadriller et dont les savanes boisées, la forêt parfois dense et rocailleuse ainsi que le relief en font un sanctuaire idéal pour les jihadistes.
Le dossier est désormais piloté par les ministres de la Défense et de la Sécurité, Téné Birahima Ouattara et Vagondo Diomandé.
JA