L’aviation ivoirienne, qui doit considérablement se renforcer pour protéger la frontière nord du pays, vient d’acquérir quatre hélicoptères de type soviétique. Elle attend aussi la livraison de matériel chinois, et table toujours sur une coopération accrue avec la France.
Dans le ciel d’Abidjan vrombissent les moteurs de nouveaux appareils opérés par l’armée de l’air ivoirienne. Fruits d’une commande passée par les services du ministre de la défense, Téné Birahima Ouattara, deux hélicoptères d’attaque Mil Mi–24 et deux hélicoptères de transport Mi–17 ont ainsi rejoint récemment les hangars de l’armée. Ces engins, de fabrication soviétique, viennent opportunément renforcer une flotte militaire aux capacités très limitées. Ils ont été livrés par la société bulgare Metalika–AB. Dirigée par Zdravko Dimitrov et très active en Afrique, la firme avait notamment proposé à la RDC du matériel militaire par l’intermédiaire de l’entreprise Agemira, également enregistrée en Bulgarie (AI du 01/06/23).
Longtemps parent pauvre des Forces armées de Côte d’Ivoire (Faci), la composante aérienne, commandée par le général Alfred Koffi N’Guessan, se doit de rapidement monter en puissance pour s’adapter à la course aux armements lancée par les pays voisins rassemblés au sein de l’Alliance des États du Sahel
(AES).
Ces dernières années, la junte burkinabè du capitaine Ibrahim Traoré ainsi que celle du général Assimi Goïta, au Mali, ont largement renforcé leurs armées à l’aide de vecteurs aériens offensifs. En témoigne notamment l’acquisition par Bamako et Ouagadougou de multiples drones d’attaque TB2 auprès du fournisseur turc Baykar. À cela s’ajoute la nécessité pour l’armée ivoirienne de contrôler plus efficacement par les airs la frontière nord du pays, menacée par de potentielles incursions de groupes djihadistes.
Enchaînement de déconvenues
La mise en service des hélicoptères Mi–24 et Mi–17
intervient à la suite d’un enchaînement de déconvenues
subies par l’administration de défense ivoirienne. Fin 2021, Téné Birahima Ouattara avait porté son choix sur l’acquisition de dix hélicoptères militaires (cinq MD–500 et cinq Agusta) via la firme israélienne TAR Ideal Concepts, filiale d’Avnon Group. Or, l’action de TAR a été rapidement entravée par d’importantes difficultés financières (AI du 14/09/23).
Le marché impliquait par ailleurs la société d’intermédiation Magen–ta Solutions, dirigée par l’homme d’affaires franco–israélien Steve Bokhobza, alias David Nakash (AI du 31/03/23). Mais en raison d’irrégularités contractuelles, les appareils n’ont pas pu être livrés. Cette situation confuse a contraint les sécurocrates ivoiriens à louer pendant un certain temps des hélicoptères Airbus H125, avant de devoir s’en séparer (AI du 08/01/25).
De ce fait, Abidjan s’est tourné vers la Chine pour s’équiper en moyens aériens (AI du 26/06/24). En juin dernier, les autorités ivoiriennes s’activaient à finaliser un important contrat avec la société publique China National Aero–Technology Import & Export Corp (Catic).
Crédit–export avec Pékin
Si elle s’oriente actuellement vers l’achat d’un lot
d’hélicoptères Harbin Z–9, la partie ivoirienne a surtout exprimé son intérêt à l’idée d’acquérir au moins trois avions de type K–8 Karakorum, également appelés JL–8, de Hongdu Aviation Industry Group. Cet appareil de conception sino–pakistanaise, déjà opéré dans la sous- région par la Ghana Air Force et par plusieurs aviations d’Afrique australe, peut servir aussi bien à des missions d’attaque au sol, dans le cadre d’opérations de contre–insurrection, qu’à l’entraînement des pilotes.
Les négociations se focalisent sur le financement des avions K–8 : l’une de ces trois unités pourrait être cédée à titre gracieux par Pékin, tandis que les deux autres pourraient être payées dans le cadre d’un crédit–export, dont les contours ne sont cependant pas définis. Les mêmes difficultés de financement compliquent l’achat de drones d’attaque, autre volet stratégique des discussions entre les autorités ivoiriennes et chinoises.
Les premières livraisons de matériel chinois sont attendues à partir de 2026, soit après l’élection présidentielle d’octobre 2025, qui remettra en jeu le fauteuil du chef de l’État ivoirien, Alassane Ouattara.
Main tendue par Paris
Le renforcement de l’armée de l’air ne devrait pas se cantonner uniquement à l’augmentation des unités de la flotte. D’importants efforts sont envisagés en parallèle pour former le personnel et remettre à niveau les infrastructures aériennes.
C’est dans ce contexte qu’Abidjan négocie actuellement les contours de sa nouvelle coopération militaire avec Paris, qui espère en tirer profit. Bien qu’ayant rétrocédé en février la base de Port–Bouët aux Faci, en présence du ministre des armées, Sébastien Lecornu, et fortement réduit leurs effectifs, les forces françaises présentes en Côte d’Ivoire souhaitent poursuivre le partenariat bilatéral en se recentrant sur le soutien à la
composante aérienne de la Côte d’Ivoire (AI du
19/02/25).
Un contingent français devrait ainsi stationner à Bouaké, dans le centre du pays, pour contribuer à la modernisation des infrastructures de la base aérienne et fournir des formations plus régulières aux pilotes et techniciens ivoiriens. La main tendue par Paris est favorablement accueillie par les pontes de l’état–major ivoirien, chapeauté par le général Lassina Doumbia. Une partie du haut commandement de l’aviation ivoirienne milite pour un rapprochement avec Paris dans ce domaine, au point d’avoir exprimé des velléités d’acquisition de deux à trois avions de combat Mirage 2000 auprès de l’armée de l’air française.
Jean Moliere . Source AI
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