La compagnie Ethiopian Airlines a mis fin à ses vols directs entre l‘aéroport d‘Abidjan et celui de Newark, à proximité de New York, dans le New Jersey. Une décision qui suscite le mécontentement de la présidence ivoirienne, laquelle espère remplacer cette liaison avec un vol Air Côte d‘Ivoire vers les Etats–Unis à l‘horizon 2023.
La rumeur bruissait déjà plusieurs depuis plusieurs semaines. C‘est désormais quasi–officiel : Ethiopian Airlines ne rouvrira pas ses vols directs entre Abidjan et l‘aéroport de Newark, dans le New Jersey, près de New York. Fruit d‘âpres négociations entre la compagnie éthiopienne et le gouvernement ivoirien, la liaison avait été ouverte en mai 2018 à raison de trois rotations hebdomadaires. Les vols assurés par un Boeing Dreamliner 787 s‘étaient interrompus en mars 2020, au plus fort de la pandémie de Covid–19. Mais malgré la réouverture des vols commerciaux au premier trimestre 2021, Ethiopian n‘avait pas relancé sa rotation vers Newark. La compagnie éthiopienne n‘aura jamais réussi à rentabiliser cette ligne dont le taux de remplissage moyen était d‘à peine 30 %.
L‘arrêt de cette liaison transatlantique a irrité dans l‘entourage d’Alassane Ouattara, qui avait beaucoup misé sur le développement de cette ligne directe – la seule – entre la Côte d‘Ivoire et les Etats–Unis. La décision est aussi une désillusion pour Amadou Koné, le ministre des transports qui avait travaillé sur le projet en étroite collaboration avec Inza Camara, consul de Côte d‘Ivoire à New York et époux de Kandia Kamissoko–Camara, actuelle ministre des affaires étrangères.
Air France reprend la main
COTE D‘IVOIRE : Au grand dam des autorités, Ethiopian Airlines abandonne sa liaison Abidjan–Newark
Les Ivoiriens souhaitant se rendre aux Etats–Unis devront donc dorénavant faire une escale à Paris, Rabat, Bruxelles ou encore Addis–Abeba. La fin de liaison Abidjan–Newark fait ainsi les affaires d‘Air France et de Royal Air Maroc (RAM), qui avaient subi de plein fouet l’arrivée d‘Ethiopian sur le créneau nord–américain en 2018. Près de 53 000 passagers se rendent chaque année aux Etats–Unis depuis la Côte d‘Ivoire.
Air Côte d‘Ivoire aux aguets
Pour autant, Air Côte d‘Ivoire n‘a pas renoncé à ses ambitions de développer d‘ici à 2023 une liaison directe depuis Abidjan vers les Etats–Unis. La compagnie a bénéficié d‘un soutien massif de l‘Etat pendant les premiers mois de la période Covid et n‘avait pas annulé ses commandes d‘appareils chez Airbus. Mais le plan de compétitivité (PECOM) et la stratégie globale de financement, validés par deux fois par le chef de l‘Etat Alassane Ouattara, peinent toujours à se mettre en æuvre. Les ministres de tutelle, Amadou Koné (transports) et Moussa Sanogo (budget), auraient également pris du retard dans la conduite du projet.
Néanmoins, le président ivoirien continue de rêver de faire d’Air Côte d‘Ivoire l‘une des principales compagnies aériennes africaines et de l‘aéroport d‘Abidjan un hub dans toute la sous–région : Air Côte d‘Ivoire est notamment en discussions depuis le printemps pour faire entrer Qatar Airways à son actionnariat. Mais la compagnie ivoirienne fait face à la concurrence accrue d‘Air Sénégal, qui s‘apprête ouvrir ce 2 septembre une première liaison entre Dakar et New York.
DIPLOMATIE
Droits de tirage spéciaux : comment l‘UEMOA joue des coudes pour récupérer les coupons–FMI des pays du Nord
Activement soutenue par la France, l‘Union économique et monétaire ouest–africaine (UEMOA) s‘est lancée dans une vaste campagne en vue de récupérer une partie des droits de tirage spéciaux obtenus par les pays du Nord en compensation de l‘impact du Covid–19. Paris et Berlin ont déjà mobilisé près de 40 milliards de dollars supplémentaires en faveur des pays d‘Afrique.
Depuis que le Fonds monétaire international (FMI) et les banques centrales ont validé le 23 août l‘aide exceptionnelle post–Covid–19 de 650 milliards de dollars en droits de tirage spéciaux (DTS), les capitales ouest–africaines se sont lancées dans un vaste lobbying international, afin de tenter de capter une partie des sommes attribuées aux pays du Nord.
Les enveloppes étant calculées à partir de la quote–part des pays au FMI, les Etats africains n‘ont reçu, à ce jour, que 33 milliards de dollars. Un total jugé « dérisoire » par plusieurs pays membres de l‘Union économique et monétaire ouest–africaine (UEMOA) au regard de l‘impact de l‘épidémie sur leur économie. D‘autant que les pays dits « développés » ont, eux, reçu près de 375 milliards de dollars de DTS.
Dans ce contexte, l‘UEMOA, emmenée par le président ivoirien Alassane Ouattara et son homologue sénégalais Macky Sall, a notamment reçu l‘appui, dès le début de l‘année, de la diplomatie française. Celle–ci mène depuis le printemps un actif plaidoyer au sein du FMI afin de transférer près de 65 milliards de DTS vers les pays du continent africain. La proposition a même été au centre du Sommet sur les économies africaines de Paris le 18 mai et a reçu le soutien de la directrice générale du FMI, Kristalina Georgieva.
Concurrence entre banques centrales
Mais pour espérer se voir allouer des DTS supplémentaires, les banques centrales africaines doivent montrer patte blanche : les capitales occidentales exigent en effet un fléchage précis des fonds alloués. Dans cette course contre la montre, chacun fourbit ses arguments. Ainsi, une importante délégation de la Banque ouest–africaine de développement (BOAD), menée par son président, le Béninois Serge Ekué, s‘est rendue à Paris en marge de la rencontre des entrepreneurs francophones organisée dans le cadre de l‘université d‘été du Medef, la semaine dernière. Ont été présentés plusieurs projets dans les domaines des infrastructures routières, de l‘énergie, de l‘éducation, de la sécurité et de la santé. Une partie d‘entre eux pourraient être directement financés via le transfert des DTS.
Paris, qui a rallié Berlin à sa cause, est d‘ores et déjà parvenue à mobiliser l‘équivalent de 40 milliards de dollars supplémentaires en faveur de l‘Afrique, selon nos informations. Si les Etats–Unis ont exprimé leur refus, ce n‘est pas le cas de la Russie, de la Chine ou encore de la Turquie, avec qui les négociations sont engagées. Mais celles–ci devraient encore s‘étendre sur au moins trois mois et trouver leur dénouement au mois de novembre, période où les budgets sont traditionnellement votés.
AI