Suspension des droits de douane par Pékin au profit des pays africains: révolution ou effet d’annonce ?
En marge du Forum sur la coopération sino-africaine, Pékin a annoncé la suppression des droits de douane pour la quasi-totalité des pays africains, à l’exception de l’Eswatini, allié de Taïwan. Présentée comme un geste fort envers le « Sud global », cette initiative vise à renforcer l’image d’une Chine partenaire supposément non-ingérente, face aux États-Unis, alors que Donald Trump vient de déclencher une guerre commerciale à l’échelle planétaire.
Effet limité. Malgré l’enthousiasme suscité, cette mesure ne modifiera pas les déséquilibres commerciaux structurels, comme le démontre le décryptage en infographies réalisée pour Jeune Afrique par Maÿlis Dudouet. L’Afrique reste en effet un exportateur de matières premières, tandis que 98 % des importations chinoises sont des produits manufacturés. Le déficit commercial subsiste – 82 milliards de dollars en 2023 – et l’industrialisation du continent, seule voie de transformation durable, progresse trop lentement pour tirer pleinement profit de cette ouverture douanière.
Africa CEO Forum 2025 : la parole aux acteurs du « New Deal »
Près de 2 800 participants, dirigeants d’entreprises, investisseurs et décideurs publics se sont rassemblés les 12 et 13 mai à Abidjan pour l’édition 2025 de l’Africa CEO Forum. Pendant deux journées intenses, un sujet au cœur de tous les échanges : comment faire émerger un « New Deal » entre public et privé pour permettre au continent de saisir ses potentialités dans le domaine économique.
CEO, ministres, experts… Parce que cette discussion stratégique est loin d’être close, nous vous proposons de retrouver, chaque semaine, les entretiens exclusifs que nous avons réalisés avec certains des principaux acteurs de ce « New Deal » en construction. Cette semaine : Khadim Bamba Diagne, secrétaire permanent du Comité d’orientation stratégique du pétrole et du gaz du Sénégal (COS Petrogaz).
La Chine a annoncé son intention de suspendre les droits de douane imposés aux produits africains. Entre effet d’annonce et impact réel, que vaut cette décision ?
C’est une annonce qui a fait couler beaucoup d’encre. En effet, le 12 juin, lors de l’édition 2025 du Forum sur la coopération sino-africaine (FOCAC), le ministre chinois des Affaires étrangères a annoncé que Pékin avait l’intention de supprimer les droits de douane sur les importations de produits en provenance de la quasi-totalité des pays africains. Dans ce contexte économique de guerre commerciale, avec son lot de conséquences, l’intention de Pékin est claire : se présenter comme une alternative crédible, en particulier vis-à-vis du Sud global, face à des États-Unis qui, sous l’impulsion de Donald Trump, ont déclaré une guerre commerciale à pratiquement tout le reste du monde — et à la Chine en particulier. Pour beaucoup d’experts, notamment le spécialiste en relations internationales Driss Aissaoui, « la Chine se pose ainsi en championne du libre-échange et locomotive du “Sud global”. De surcroît vis-à-vis d’un continent lui aussi malmené par les États-Unis. De fait, si Pékin est la première cible de l’offensive protectionniste de Washington, de nombreux pays africains sont également menacés de surtaxes douanières, et une trentaine d’entre eux pourrait perdre le bénéfice des franchises tarifaires accordées dans le cadre de l’African Growth and Opportunity Act, un accord commercial vieux d’un quart de siècle aujourd’hui en sursis », prévient l’expert.
Jean Moliere
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