Alors que la Fecafoot a proposé que le prochain match des Lions indomptables se dispute à Douala puis à Garoua, le ministre des Sports tente d’imposer Yaoundé.
Douala, Yaoundé ou Garoua? Depuis plusieurs jours, la question du lieu de la rencontre devant opposer le 7 septembre prochain la sélection nationale camerounaise à
celle de la Namibie cristallise le débat au Cameroun. Le sujet a dépassé les frontières du football et fait figure de nouvelle bataille dans la guerre qui oppose le ministère des Sports et la Fédération camerounaise de football (Fecafoot).
Tout a commencé début juillet, lorsque la Fecafoot a engagé des démarches afin que le match Cameroun- Namibie, comptant pour la première journée des éliminatoires de la Coupe d’Afrique des nations (CAN) 2025, se déroule au stade de Japoma, à Douala. Samuel Eto’o, son président, a saisi le directeur de l’Office national des infrastructures et équipements sportifs (Onies) afin que celui–ci mette à disposition l’enceinte.
Felix Ewane, administrateur de l’Onies, n’y a pas vu d’objection au départ, au point de délivrer à la Fecafoot un accord de principe et une facture en bonne et due forme. Mais les choses se sont emballées lorsque, le 7 août, la fédération a ouvert la billetterie. Au ministère des Sports, où la sélection nationale fait l’objet de la plus grande attention, le choix opéré unilatéralement par l’équipe d’Eto’o a fait grincer des dents.
Narcisse Mouelle Kombi veut imposer Yaoundé
Au sein de l’encadrement technique des Lions indomptables, le sélectionneur Marc Brys, soutenu par le ministre des Sports Narcisse Mouelle Kombi et contesté
par Samuel Eto’o, avait en effet déjà affiché sa préférence pour une autre enceinte, celle du stade omnisports Ahmadou Ahidjo de Yaoundé. Un penchant que le Belge
a réitéré dans un courrier adressé le 21 août à la Fecafoot et qu’il justifiait alors par la nécessaire << reconstruction de l’équipe nationale >>.
Sous pression des autorités, l’Onies a donc dû faire volte- face. S’appuyant sur un autre courrier émanant du secrétariat général de la présidence de la République – où
Ferdinand Ngoh Ngoh est un soutien de Narcisse Mouelle Kombi – et prescrivant << une bonne organisation matérielle » de la rencontre, son directeur est revenu sur l’accord de principe qu’il avait donné à la Fecafoot.
Felix Ewane expliquait alors que << la pelouse de Japoma ne pouvait plus garantir les conditions minimales d’exploitation, de confort de jeu et de santé des athlètes >>, ceci en raison d’une << tendance haussière des précipitations >> à Douala. Un revirement qui a eu pour conséquence de remettre le ministre des Sports au cœur du jeu. Lors de la traditionnelle réunion de préparation des matchs des Lions indomptables au ministère, Narcisse Mouelle Kombi a donc enfoncé le clou.
Les responsables de l’Onies ont réaffirmé que les conditions météorologiques ne permettaient pas que la rencontre se tienne à Douala. Un avis qu’ont affirmé partager Émile Bamkoui, patron de la Sécurité militaire, et Kalkaba Malboum, président du Comité national olympique. Les représentants de la Fecafoot ont alors décidé de quitter la salle. C’est en l’absence de ces derniers que Mouelle Kombi a tranché : «< Le match doit se jouer au stade de Yaoundé. Nous demandons à la Fecafoot d’en informer la Confédération africaine de football [CAF]. >>
Des contraintes budgétaires en toile de fond
Samuel Eto’o n’a pas pour autant abdiqué. Le samedi 24 août, la Fecafoot a envoyé aux responsables de la CAF des images du mauvais état du stade Ahmadou Ahidjo, mais aussi celles – plus flatteuses – d’un autre stade, celui de Garoua, dans le nord du pays. Selon la fédération, ce troisième choix serait en effet le meilleur pour répondre aux mauvaises conditions météorologiques évoquées au ministère des Sports.
Ce lundi 26 août, la Fecafoot a finalement saisi le ministère des Sports pour lui indiquer que la CAF avait exprimé son accord pour ce troisième choix. Narcisse Mouelle Kombi va–t–il se plier au choix de Garoua ou tenter d’imposer celui de Yaoundé ? Pour le ministre, la problématique est aussi budgétaire et son conseiller technique, Cyrille Tollo, a d’ores et déjà annoncé que les incidences financières d’un déplacement dans le nord du pays étaient trop importantes pour que cette option puisse être retenue.
Paul Biya et Louis–Paul Motaze vont–ils s’attaquer aux retraites de l’armée ?
<< Qui va supporter les surcoûts? a–t–il notamment interrogé lors d’un débat à la télévision camerounaise ce 25 août. Le ministre des Finances a été clair à l’Assemblée nationale : compte tenu du contexte financier et des contraintes budgétaires actuelles de l’État, il ne prendra en charge que les dépenses incompressibles […]. [Si Garoua était choisi, il faudrait] louer des avions pour les Lions et les Namibiens, déplacer les équipes de la télévision pour la retransmission… Qui va payer? »
Entre Mouelle Kombi et Eto’o, l’impossible consensus
Au sein de l’opinion, les avis sont partagés. Pour les soutiens d’Eto’o, c’est à la Fecafoot de choisir les sites des rencontres des Lions indomptables. Une vérité
incomplète, estime Parfait Siki, ancien secrétaire général de la fédération, qui explique que le choix des stades a toujours fait l’objet de consensus. << Si c’est bien la Fecafoot qui informe la CAF du lieu choisi pour le match, vu qu’elle est son unique interlocuteur dans ces cas, elle n’est pas la seule à prendre la décision », explique l’ancien journaliste.
Celui–ci ajoute : << La procédure appliquée de tout temps veut que la fédération demande au coach quel est le stade qui convient le mieux à l’équipe. Le choix peut faire
l’objet d’une discussion si la fédération a une préférence marketing ou logistique. Le ministère des Sports est alors saisi pour une non–objection, car c’est lui qui a la charge de mobiliser les services de l’État qui entrent dans l’organisation, notamment la sécurité. Ce n’est qu’après que la Fecafoot communique le lieu consensuel à la
CAF. » Quelle sera l’issue de ce nouveau bras de fer entre le ministère des Sports de Narcisse Mouelle Kombi et la Fecafoot de Samuel Eto’o ? Dans chaque camp, on espère en tout cas pouvoir tirer parti de cette dernière bataille en date. Pendant ce temps, la sélection camerounaise va tenter tant bien que mal de faire abstraction du contexte et de la polémique. Dans quelques jours, Marc Brys doit publier la liste des joueurs retenus pour affronter la Namibie et tenter de se qualifier pour la prochaine CAN au Maroc.
Jean Moliere . Source/ JA
Leave feedback about this