Il se dit « aux anges » après la victoire de son parti d’extrême droite aux élections régionales de Thuringe. Björn Höcke, le leader local d’Alternative pour l’Allemagne (AfD), a assuré, dimanche 1er septembre, être « prêt à prendre des responsabilités pour gouverner » ce Land du centre-est du pays, où il a recueilli 32,8% des voix. L’arrivée au pouvoir de l’AfD dans la région devrait toutefois être empêchée par un cordon sanitaire, après notamment que le chancelier allemand, le social-démocrate Olaf Scholz, a appelé « tous les partis démocratiques à former des gouvernements stables sans l’extrême droite ».
Quelle que soit l’issue des tractations, en Thuringe, l’AfD gagne du terrain, mené par l’un des visages les plus radicaux de l’extrême droite allemande. Propos racistes et complotistes, utilisation de slogans nazis… Franceinfo dresse le portrait de Björn Höcke.
Une famille nostalgique de la « patrie perdue »
Au sortir de la Seconde Guerre mondiale, les grands-parents de Björn Höcke, expulsés de Prusse-Orientale par l’Armée rouge soviétique, s’installent dans l’ouest de l’Allemagne, près de la frontière avec la Belgique, selon The Guardian. Trois décennies plus tard, Björn Höcke, né en 1972, grandit bercé par leurs récits autour de la « patrie perdue », ce qui ne manque pas d’éveiller chez lui « un intérêt politique », comme il l’a raconté à une chaîne de télévision locale Salve TV en 2015. Son père, lui, figure parmi les abonnés du journal antisémite Die Bauernschaft, fondé en 1969 par un ancien Waffen-SS négationniste, selon une enquête de l’hebdomadaire Die Zeit.
Au tournant des années 2000, Björn Höcke devient professeur d’histoire. « Les élèves – pour beaucoup issus de l’immigration – n’étaient pas réceptifs à mes préoccupations éducatives, notamment la transmission des traditions culturelles allemandes et européennes« , relate-t-il dans un livre publié en 2018, consulté par The Guardian. Dans cet ouvrage, il accuse des élèves originaires de Turquie et d’Afrique d’avoir, un jour, exprimé « leur rejet agressif de la germanité ».
Une ascension politique extrémiste
Björn Höcke entre en politique au début des années 2010, en Thuringe. Il y devient porte-parole de l’AfD en 2013, avant d’être élu député régional en 2014 et nommé, cette même année, président de son groupe parlementaire, une fonction qu’il occupe toujours dix ans plus tard. Sur ses terres, Björn Höcke radicalise encore plus l’AfD, au sein de laquelle il lance un courant extrême, l’Aile (Flügel), relève France 24.
Pendant des années, des figures de l’AfD tentent d’expulser Björn Höcke du parti d’extrême droite, où ses propos choquent. En 2015, il affirme ne pas « supposer que chaque membre du NPD », un parti néonazi allemand, puisse « être qualifié d’extrémiste », rapporte The Guardian. En 2017, il qualifie le mémorial de l’Holocauste, à Berlin, de « monument de la honte ». L’Aile finit par être dissoute par l’AfD en 2020, après que la branche de Björn Höcke a été placée sous surveillance par les services de renseignement, selon la chaîne Deutsche Welle. Pour autant, le leader de l’extrême droite en Thuringe reste membre de l’AfD.
Des mots empruntés aux nazis
En 2017, le conseil fédéral du parti s’inquiète de la « proximité excessive » de Björn Höcke « avec le national-socialisme », selon The Guardian. Même constat du chercheur Axel Salheiser, interrogé en 2020 par Deutsche Welle, qui évoque des termes « étrangement similaires » à ceux employés par les nazis. Avant lui, le sociologue Andreas Kemper avait relevé plus de dix « ressemblances », parmi lesquelles le fait de qualifier ses rivaux à l’AfD de « dégénérés » ou ses opposants politiques de « corrupteurs du peuple » – un terme employé par Hitler dans Mein Kampf, rappelle The Guardian. En 2019, un tribunal a d’ailleurs donné raison à des manifestants qui qualifiaient Björn Höcke de « fasciste ».
Cette année, Björn Höcke a été condamné à deux reprises pour avoir employé des slogans nazis. En mai, il a écopé d’une amende pour avoir repris le slogan national-socialiste « Alles für Deutschland » (« Tout pour l’Allemagne ») au cours d’un meeting en 2021. En juillet, il a été condamné à une nouvelle amende pour avoir, en 2023, demandé au public « Tout pour ? », l’encourageant à répondre « l’Allemagne ». L’utilisation de la terminologie nazie est formellement interdite en Allemagne, tout comme d’autres symboles de cette époque.
En avril, lors d’un meeting près d’Erfurt, en Thuringe, auquel franceinfo a assisté, Björn Höcke a également tenu sans filtre des propos xénophobes et racistes. Il a en outre défendu des thèses complotistes sur la pandémie de Covid-19.
Une ligne pro-russe
Même s’il n’a pas grandi dans l’est de l’Allemagne, Björn Höcke s’adresse aux citoyens nostalgiques de la RDA. Vendredi, il a posté sur son compte X une vidéo le montrant sur une moto Simson, marque culte de l’ex-Allemagne de l’Est. « C’est un morceau de liberté, un morceau d’ancienne culture et nous nous battons pour les traditions », y vante-t-il.
Une « Ostalgie » qu’il cultive aussi à travers des positions pro-russes assumées. Opposé à la poursuite des livraisons d’armes à l’Ukraine, Björn Höcke est favorable à des négociations avec la Russie, « un pays en difficulté » et qui « veut la paix », selon lui.
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