15 octobre 2025
Paris - France
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Côte d’Ivoire: la stratégie jusqu’au- boutiste de Thiam et Gbagbo peut- elle payer? 

Le Front commun, qui représente une partie des candidats inéligibles à la présidentielle, a appelé à bloquer le pays, après deux jours de tension entre les forces de sécurité, les manifestants et certains leaders de l’opposition

Lors d’une manifestation à Abidjan, le 9 août 2025, afin de dénoncer l’exclusion de Laurent Gbagbo et Tidjane Thiam des listes électorales, les empêchant de se présenter à l’élection présidentielle.

Tandis que les cinq candidats à l’élection présidentielle du 25 octobre, dont le président sortant Alassane Ouattara, sont déjà en campagne, la colère de l’opposition ineligible est montée d’un cran à Abidjan. Le « Front commun »>, formé par le parti démocratique de Côte d’Ivoire (PDCI) de Tidjane Thiam et le Parti des peuples africainsCôte d’Ivoire (PPACI) de Laurent Gbagbo, a renouvelé son appel à manifester après une journée de tensions entre militants et forces de l’ordre

Alors que la marche du 11 octobre, interdite par la préfecture, a conduit à 237 interpellations et à de violentes altercations, selon le ministère de l’Intérieur, le 

Front commun a << salué avec reconnaissance et admiration >> leurs soutiens s’étant malgré tout déplacés. Et il a appelé à de nouvelles manifestations << pour la démocratie, la justice et la paix» tous les jours sur l’ensemble du territoire ivoirien, conseillant aux militants 

de porter des vêtements orange. Un appel relayé par la militante Pulchérie Gbalet : << #Bloquonstout », a publié l’opposante sur ses réseaux sociaux, après avoir affirmé que des << individus encagoulés » avaient tenté de l’interpeller à son domicile. Elle avait été arrêtée en août 2020 pour << perturbation de l’ordre public et incitation à la révolte >>

Affi N’Guessan, Akossi Bendjo et Gbalet inquiétés 

Pulchérie Gbalet n’est pas la seule activiste de l’opposition à avoir été inquiétée. Le PPACI a dénoncé dans un communiqué l’intervention des forces de l’ordre au domicile du viceprésident du PDCI Noël Akossi Bendjo 

dans la nuit du 10 au 11 octobre. << Trois cargos de forces de l’ordre se sont garés devant mon domicile autour de 19 heures. Les gardiens leur ont dit que je n’étais pas . Ils ont menotté l’un d’entre eux et ont forcé l’autre à les conduire dans la maison. Sans présenter de mandat, ils ont cassé les portes et fouillé tous les recoins jusqu’à 22 heures », confie l’intéressé. Joint dimanche au téléphone par Jeune Afrique depuis un lieu «< il s’est mis à l’abri en attendant que les choses se tassent», le coordonnateur général du PDCI, figure de l’alliance de l’opposition, exprime son indignation

L’exmaire du Plateau avait été convoqué par la préfecture au préalable, document que le siège du PDCI avait refusé de réceptionner en son absence. La convocation a finalement été envoyée dans la nuit. << Cela signifie qu’on est dans un pays les hommes politiques n’ont pas droit à la parole. C’est une façon de faire taire les gens !, regrettetil. Mais on va continuer à faire des marches pacifiques, c’est notre droit. >> 

 Côte d’Ivoire : lors de son premier meeting, à Daloa, Alassane Ouattara promet de «< faire plus >> 

Président du Front patriotique ivoirien (FPI) dont la candidature a également été rejetée, Pascal Affi N’Guessan a lui aussi fait l’objet d’une descente de police 

à son domicile. Plusieurs dizaines de membres des forces de sécurité ont encerclé sa résidence de la Riviera Golf, à Cocody, le 12 octobre dans la soirée. Le député a confirmé à Jeune Afrique que les militaires avaient finalement quitté les lieux après plusieurs heures sur place, aux alentours de minuit

Si son parti n’a pas intégré le Front commun, Pascal Affi  N’Guessan et d’autres membres de la Coalition pour une alternance pacifique (CAPCI) sauf Simone Ehivet Gbagbo se sont rapprochés de l’alliance formée par le PDCI et le PPACI ces dernières semaines. Une rencontre entre les leaders politiques de ces deux plateformes était prévue le 10 octobre, avant d’être annulée << pour des mesures de sécurité »

Forte répression 

Face au jusqu’auboutisme de l’opposition, qui appelle toujours au dialogue politique et conteste la tenue de l’élection présidentielle sans ses candidats, les autorités ivoiriennes font preuve d’une grande fermeté. Les réseaux sociaux sont très encadrés, comme l’a rappelé le procureur de la République Oumar Koné Braman fin 

septembre: << Tous les acteurs de discours ou propos injurieux, diffamatoires et insurrectionnels mettant en péril la République seront arrêtés et poursuivis ». Le dispositif sécuritaire déployé, 44000 personnes 18000 policiers, 18 000 gendarmes et environ 8000 militaires pour assurer le bon déroulé du scrutin, a fait une première démonstration de force le 11 octobre

À côté de l’église SaintJean, le rendezvous avait été donné à 8 heures pour la marche pacifique qui n’a pas pu avoir lieu, les premières interpellations ont eu lieu en tout début de matinée. Après plusieurs vagues d’arrestations de militants arborant des pagnes aux couleurs du PDCI ou encore des tshirts « Trop, c’est Trop», slogan de Laurent Gbagbo, les forces de l’ordre se sont déployées sur l’esplanade du marché de Cocody en usant de grenades lacrymogènes pour disperser la foule. Quelques échauffourées ont eu lieu à Anono ou à Yopougon, rapidement contenues par les militaires

A lire: a « On ne veut plus de violences, mais on veut du changement >>: en Côte d’Ivoire, Daoukro retient son souffle 

C’est à Blockhaus, village ébrié jouxtant la lagune, à la population très dense et aux rues étroites, que les tensions ont été les plus vives. Jusqu’en début d’aprèsmidi, les militaires ont tenté d’interpeller les derniers manifestants jusque dans des habitations ou sur les toits des immeubles

Les leaders de l’opposition, qui devaient rejoindre les militants, ne se sont finalement jamais rendus sur les lieux. De peur d’y être interpellés ? Hormis les communiqués parus sur les réseaux sociaux des partis, les cadres du PDCI et du PPACI se font discrets. << Je veux avoir une pensée pour tous ceux qui ont été arrêtés », a affirmé Tidjane Thiam le 13 octobre depuis Paris, avant de mentionner l’interpellation de deux militantes, Assata Chérif et Djénéba Soumahoro, tandis qu’elles s’adressaient à la presse internationale. << Pourquoi un tel déclenchement de désordre ? Pourquoi créer un climat où 

on interdit aux uns et aux autres d’exercer la liberté de manifester pacifiquement ?», a ajouté le leader du PDCI. De son côté Laurent Gbagbo n’a pas pris la parole publiquement ces dernières semaines

<«<La préfecture n’a pas reçu de demande de manifestation

La police a juste fait son travail », explique le ministre de la Communication et porteparole du gouvernement, Amadou Coulibaly, contacté par Jeune Afrique. Si 

quelques centaines de militants ont fait le déplacement, conscients de l’interdiction et des risques d’interpellation, le 11, reste à savoir si les appels à bloquer le pays vont être entendus. << Il faut arrêter de répéter des slogans, ce n’est pas incantatoire !, ironise le ministre. À Korhogo, en tout cas, rien n’est bloqué, et la campagne se passe très bien

JA

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