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Côte d’Ivoire : Jean-Louis Billon, (trop ?) impatient d’être président

La déclaration de candidature à la présidentielle de 2025 de ce député et homme daffaires prospère a suscité un tollé sur la scène politique. Mais il devra dabord convaincre au sein de son propre camp, le PDCIRDA

Lorsquon est un des hommes les plus riches de la Côte dIvoire, que peuton désirer de plus ? Pour JeanLouis Billon, cest devenir président de la République. En déclarant sa candidature à lélection présidentielle de 2025, le 22 septembre dernier, ce quinquagénaire a jeté un pavé dans la mare. Alors que le débat sur le ret our dune limitation d‘âge pour briguer la magi strature suprême fait rage, il veut donner les clés du pays à une nouvelle génération dhommes politiques. Et mettre à la retraite les trois figures principales de la scène politique ivoirienne, lactuel président, Alassane Ouattar a, 79 ans, et ses deux prédécesseurs, Laurent Gb agbo et Henri Konan Bédié, respectivement 76 et 87 ans

À quatre ans de léchéance, Billon est le premier à dévoiler ses intentions. De façon prématurée ? « Ce n‘est pas un coup de tête. Déjà au collège, mes camarades savaient que javais cette ambition », glisset-il. Ce samedi 25 septembre, les tensions créées par lannonce de sa candidature sont encore vives. Pourtant, en franchissant le pas du portail de sa verdoyante villa au Plateau, cest le calme qui règne. De fait, l’impatience de lhéritier de lempire agro industriel Sifca nétait un secret pour personne à Abidjan

Enfin son tour

En 2020 déjà, Billon y avait cru. Mais il sétait résolu à soutenir la candidature du président du PDCIRDA, Henri Konan Bédié. « Le parti était menacé, il y avait des débauchages de cadres, se souvientil, Bédié sest présenté en garant de lunité et de la pérennité du PDCI. Reste que cette élection a été une grande mascarade que nous avons décidé de ne pas la cautionner au final. Cest lensemble du processus même qui é tait vicié en 2020. » 

Aux côtés du Front populaire ivoirien de Laurent Gbagbo et de la majorité des partis politiques, le PDCI a appelé à boycotter le scrutin lors duquel Alassane Ouattara briguait un troisième mandat. Cette foisci, il veut y croire, son tour est arrivé. Il en est sûr, Bédié, dont il est lun des protégés, ne se représentera pas : « Dans son dernier discours, le président Bédié dit quil mettra toutes ses forces pour quil y ait de la 

cohésion. » 

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Le chef dentreprise a déjà les grandes lignes de son programme. Il veut « refondre » la Constitution ivoirienne et garantir une séparation des pouvoirs. « Estce normal pour un contribuable de payer la présidence, la vice présidence, lAssemblée nationale, le Sénat, les conseil régionaux, les mairies, la commission électorale, le Conseil constitutionnel... ? Il y a une multitude dinstitutions que le contribuable paye au détriment de son développement et de son bienêtre immédiat. Nous devons débattre de ces questions et mettre en place une Constituante », insiste-til

ni JeanLouis Billon : « Je s...

BILLON SECOUE LE COCOTIER 

Puissante famille 

Celui qui a fait de la réconciliation des jeunes avec la classe politique son leitmotiv, prépare activement 2025 avec une équipe « déterminée ». Le « Mouvement national des billonnistes pour 2025 » sest mis en ordre de bataille et a commencé à installer des représentations locales dans plusieurs villes du 

pays

Mais cet activisme nest pas vu dun bon oeil par tous, à commencer par sa propre famille politique, en pleine restructuration et minée par des divisions internes. Ces dernières semaines, deux clans se sont affrontés par médias interposés autour de sa candidature. Sauratil, le moment venu, les rassembler ? Pas sûr, dautant que dautres poids lourds du PDCI pourraient, euxaussi, vouloir se lancer dans la 

course

IL JOUAIT AUPRÈS DHOUPHOUËTBOIGNY OU DE JACQUES CHIRAC 

À ceux qui laissent entendre quil na pas la carrure pour être président, Billon répond : « Jai gagné toutes les élections auxquelles jai participé. Nous ferons gagner le PDCI ». Sil est aussi confiant, cest quil a plusieurs atouts dans la manche. L’homme daffaires prospère est issu dune famille puissante. Son père, Pierre Billon est le fondateur de la Sifca. Né en 1964 à Bouaké, il a grandi entouré de personnalités de premier plan. Enfant, il jouait auprès dHouphouëtBoigny ou de Jacques Chirac. Après des études en droit des affaires en France, puis aux ÉtatsUnis, JeanLouis Billon rentre en Côte dIvoire en 1995, avant de prendre, quelques années plus tard, la tête de la Sifca. Son épouse, Henriette Gomis, est la fille de Charles Gomis, ancien ambassadeur en Fran ce, qui était proche dAlassane et Dominique Quattara, et la seur de Sylvie Tanoh, lépouse de l’ancien ministre Thierry Tanoh

Ascension politique 

En 2001, Billon devient maire indépendant de la commune de Dabakala, poste quil occupe jusquà son élection à la présidence du conseil régional du Hambol, en 2013. Mais en pleines tensions entre le PDCI et le RHDP, il est suspendu de son poste, le 12 juillet 2017. Si on lui reproche davoir changé détiquette politique en cours de mandatil avait été élu sous la bannière du Rassemblement des Républicains, lui dénonce une sanction politique. Billon est également passé par plusieurs portefeuilles ministériels : le Commerce, lArtisanat et la Promotion des PME de 2012 à 2016, puis le Commerce, jusquen 2017

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Des postes qui ne lont pas empêché de garder une certaine indépendance, quitte à agacer au sein du pouvoir. Comme en 2014, lorsquil conteste dans une interview lattribution du second terminal à conteneurs du port dAbidjan au consortium formé autour du groupe français Bolloré. « Nous devons protéger les champions nationaux en créant les conditions pour leur permettre de grandir et développer un nationalisme. Il y a des choses à la portée des entreprises ivoiriennes », nous confietil quelques années plus tard

En 2017, il nest pas reconduit au gouvernement, mais il assure ne pas lavoir mal vécu. Nommé par Bédié secrétaire exécutif du parti, chargé de la Communication et de la propagande, lhomme daffaires devient alors lun des principaux opposants à lalliance avec le parti présidentiel. Désormais député de Dabakala, JeanLouis Billon espère que son fief sera un tremplin pour la présidence

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Reste que Bédié na pas peutêtre pas dit son dernier mot. Alors que Laurent Gbagbo est en train de créer un nouveau parti, et que les proches dAlassane Ouattara insistent sur le fait que le président nest quau premier mandat de la troisième république, Bédié pourrait être tenté de se lancer à nouveau dans la course. Rien nindique que le « jeune » Billon de 56 ans osera tenir tête à son aîné

Après lannonce de sa candidature perçue par beaucoup comme un défi au patron du PDCI, JeanLouis Billon a été contraint de présenter ses excuses au Sphinx de Daoukro, le 28 septembre. Au sortir dun échange avec lancien président dans sa villa de Cocody, une photo les montrant tous les deux a fait le tour de la toile. « Ces derniers temps, lactualité a essayé de nous opposer et je suis venu lui dire qu‘il n‘en était rien et que si certains propos que j‘avais tenus ont pu le heurter à cause des interprétations qui ont été faites, cela nétait pas intentionnel », a déclaré Billon à la sortie de laudience avec Bédié. Rétropédalage ? Loin de lever toute ambiguïté, cette séquence aura surtout montré la volonté du jeune loup de nager le vieux crocodile. La course est 

encore longue jusquen 2025, inutile de se faire des ennemis au sein de son propre camp

JA

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