8 octobre 2025
Paris - France
JUSTICE

Après sa condamnation à cinq ans de prison, Nicolas Sarkozy peut-il échapper à une incarcération ?

Placé sous mandat de dépôt à effet différé, l’ancien chef de l’Etat est convoqué le 13 octobre par le Parquet national financier, qui doit fixer la date du début de sa détention.

« S’ils veulent absolument que je dorme en prison, je dormirai en prison, mais la tête haute. » A sa sortie du tribunal correctionnel de Paris, jeudi 25 septembre, Nicolas Sarkozy ne décolère pas. Condamné à cinq ans d’emprisonnement pour association de malfaiteurs dans l’affaire du financement libyen de sa campagne de 2007, l’ex-président devient le premier ancien chef de l’Etat de la Ve République à se voir infliger une peine de prison ferme.

Mais le jugement, comme souvent en matière pénale, ouvre la voie à une mécanique complexe : appel, mandat de dépôt différé, aménagement de peine, exécution provisoire… Que va-t-il se passer concrètement pour lui ?

L’ex-président va faire appel du jugement

Les magistrats n’ont pas exigé l’incarcération de Nicolas Sarkozy dans la foulée du rendu de la décision. Ils auraient pourtant pu, via un mandat de dépôt à effet immédiat, qu’ils ont réclamé pour deux autres prévenus : Alexandre Djouhri et Wahib Nacer. « Le tribunal observe que vous ne vous êtes jamais dérobé à la moindre convocation », a argué la présidente de la cour pour justifier ce choix. Toutefois, au vu des faits qui lui sont reprochés, d’« une gravité exceptionnelle » et « de nature à altérer la confiance des citoyens », l’ancien chef de l’Etat se voit tout de même imposer un mandat de dépôt à effet différé, un dispositif né en 2020.

Soupçons de financement libyen de la campagne de Nicolas Sarkozy : l’article à lire pour comprendre cette affaire d’Etat

Cela implique que Nicolas Sarkozy a l’obligation de se présenter devant le procureur de la République dans un délai d’un mois, selon le Code de procédure pénale(Nouvelle fenêtre). La date a d’ores et déjà été fixée : il est convoqué le 13 octobre devant le Parquet national financier. Le magistrat lui fixera alors la date et l’heure de son incarcération, dans un délai qui ne pourra excéder quatre mois. Nicolas Sarkozy passera donc sa première nuit en prison au plus tard le 13 février. « Dans la mesure du possible, peut-on lire dans les textes de loi(Nouvelle fenêtre)la date d’incarcération est déterminée en tenant compte de la situation personnelle du condamné et, s’il y a lieu, du taux d’occupation de l’établissement pénitentiaire et de son évolution prévisible. »

Selon les statistiques officielles, un tiers des condamnations correctionnelles sont assorties de mandats de dépôt à l’audience. Mais ce chiffre est gonflé par les comparutions immédiates, relève une parquetière auprès de l’AFP. En revanche, ces mandats sont « très rares (…) pour les infractions financières », souligne Olivier Cahn, professeur de droit pénal à l’université de Paris-Nanterre, également interrogé par l’agence de presse.

Nicolas Sarkozy n’a pas tardé à faire savoir qu’il contestait le jugement. Mais sur le plan pratique, son appel ne suffira pas à suspendre l’exécution de la peine, car la peine prononcée est soumise à exécution provisoire. Cette modalité signifie que la décision s’appliquera jusqu’à une éventuelle audience en seconde instance.

Une possible demande de mise en liberté

Cette question n’est pas nouvelle : elle était déjà au cœur du débat sur la peine d’inéligibilité infligée à Marine Le Pen, qui semble en garder encore aujourd’hui un goût amer. « Au-delà de la personne de l’ancien président Nicolas Sarkozy, la négation du double degré de juridiction par la voie de la généralisation de l’exécution provisoire par certaines juridictions représente un grand danger, au regard des grands principes de notre droit, au premier rang desquels se trouve la présomption d’innocence », a réagi la leader d’extrême droite sur X(Nouvelle fenêtre).

Derrière la passe d’armes politique se cache une question plus technique, et souvent mal appréhendée : celle de l’aménagement de peine. Le mandat de dépôt à effet différé ne signifie nullement « la possibilité d’un aménagement de peine », prévient Camille Radot, avocat pénaliste au barreau de Paris. « Il est bien trop prématuré d’utiliser ce terme », insiste-t-il, y compris au regard de l’âge – 70 ans – de l’ancien président. Car pour qu’une peine soit aménageable, il faut qu’elle soit définitive, ce qui n’est plus le cas dès lors que Nicolas Sarkozy a annoncé son intention de faire appel.

En revanche, une autre voie existe : dès son placement en détention « sous le régime de la détention provisoire », l’ancien président pourra formuler une demande de mise en liberté. A partir de ce moment-là, la cour d’appel aura deux mois pour trancher. Si elle donne son feu vert, l’ex-chef de l’Etat pourrait être placé sous bracelet électronique ou sous contrôle judiciaire, dans l’attente de son procès en appel. En revanche, son passage par la case prison, même pour une durée relativement brève, semble inéluctable.

AFP

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