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Présidentielle en Côte d’Ivoire : la croissance démographique, une urgence absente de la campagne 

Face à une croissance démographique galopante, la Côte d’Ivoire doit impérativement adapter son économie. Comment faire face au grand défi des prochaines décennies? Décryptage en infographies

Le 25 octobre, 8,7 millions d’électeurs ivoiriens sont appelés aux urnes pour départager les cinq candidats en lice pour la présidentielle. Alors que la campagne amorce sa dernière ligne droite, il est un dossier qui, bien que peu abordé lors des meetings et dans les programmes des différents candidats, sera sur le bureau du président élu dès le premier jour de son mandat: celui de la croissance démographique et de ses conséquences sur l’économie du 

pays

En 30 ans, la population de la Côte d’Ivoire a plus que doublé, passant de 14 à 31 millions d’habitants entre 1994 

et 2024. Elle devrait encore doubler au cours des deux prochaines décennies, pour atteindre 59 millions d’ici 2054. Pour l’heure, le pays ne semble pas prêt à faire face à cette vague. Car s’il affiche l’un des taux de croissance du PIB les plus dynamiques au monde (6,5% en 2024), il peine à transformer ces performances macroéconomiques en véritable acquis pour l’ensemble de sa population

Une croissance démographique dynamique 

L’un des indicateurs les plus justes pour mesurer la répartition des fruits de la croissance est l’espérance de vie: sur ce front, la Côte d’Ivoire affiche l’un des taux les plus faibles d’Afrique de l’Ouest. Une tendance qui s’explique, selon l’économiste ivoirien Séraphin Prao, par une << croissance démographique rapide et [des] disparités régionales qui entretiennent les inégalités »>

Des inégalités qui perdurent 

L’inégalité du taux de réduction de la pauvreté entre milieu rural et milieu urbain est patente: en 2021, l’incidence de pauvreté a surtout reculé en milieu urbain

passant de 24,7% à 22,2% entre 2018 et 2021, tandis qu’il stagne en milieu rural, il est passé de 54,7% à 54,4%selon les chiffres de la Banque africaine de développement (BAD)

Une espérance de vie plus faible que la moyenne régionale 

Espérance de vie à la naissance (années

74 72 70 68 66 64 62 60 58 56 54 2005 2010 2015 2020 

*moyenne en Afrique subsaharienne 

Maroc Sénégal 

moyenne

Côte d’Ivoire 

Bénin 

Deux trajectoires ascendantes dans l’espace 

Pourtant, Abidjan a réalisé de nombreux progrès ces dernières années. Dans le domaine de l’accès aux soinsles autorités ont lancé une couverture maladie universelle 

en 2019, qui bénéficie, en théorie, aux 15 millions de personnes inscrites. Or le dispositif peine à être appliqué réellement: de fait, moins de 4% des enrôlés auraient 

effectivement utilisé leur carte en 2025

Accès à l’énergie: des progrès croissants 

Autre sujet crucial pour relever le défi démographique : l’accès à l’énergie. Alors que les besoins en électricité augmentent, le pays parvient à maintenir un bon taux d’accès, avec 72% de la population ayant accès au réseau en 2023 lorsque la moyenne était de 53% en Afrique subsaharienne

Les investissements en la matière se sont multipliés ces dernières années, notamment sur le plan des énergies renouvelables, qui représentaient 30% du mix 

énergétique ivoirien en 2024, année de la mise en fonction de la centrale photovoltaïque de Boundiali, la première en Côte d’Ivoire. Abidjan, qui affiche un objectif de couverture électrique de 100% d’ici 2030, a décidé d’y mettre les moyens grâce à une enveloppe totale de plus de 7,6 milliards d’euros pour les cinq ans à venir

Côte d’Ivoire : un accès à l’électricité croissant… 

Taux d’accès à l’électricité (%

10090- 80- 70- 60 –50- 40- 30- 20 –10- 2005- 2010 2015 

G raphique: Maylis Dudouet Source: Banque mondiale Maroc Sénégal Côte d’Ivoire Bénin 

Afrique subsaharienne 

2020 

….audessus de la moyenne subsaharienne 

Taux d’accès à l’électricité en 2023 (%24,32 43,24 62,16  80’18 

Éducation: un défi à relever 

L’accès à l’éducation, dont les manifestants de la Gen ont fait l’un de leurs leitmotivs de Rabat à Antananarivocompte aussi parmi les chantiers prioritaires pointés par la BAD. Avec deux axes sur lesquels l’institution insiste avec force: l’urgente nécessité d’améliorer l’accès à l’éducation des filles et de mettre en place des formations à l’entrepreneuriat

Sur le premier chantier, la Côte d’Ivoire se place au- dessus de la moyenne africaine en termes de scolarisation des jeunes filles en classe de primaire (70%), comme le montre le graphique cidessous, un taux qui croît régulièrement depuis une décennie. C’est après que les disparités s’aggravent: les taux de scolarisation dans l’enseignement secondaire révèlent un écart entre les sexes, avec 52% de filles scolarisées contre 58% de garçons. << Le faible niveau d’éducation, en particulier pour les filles, est en partie au nombre relativement élevé de mariages d’enfants et de grossesses précoces »>, jugeait l’Unesco en janvier 2024

Scolarité féminine: un taux d’achèvement relatif pour les filles 

Taux d’achèvement de l’école primaire, filles (%

2017 © 2018 2019 2020 2021 

2015 2016 2022 2023 

Côte d’Ivoire 

Maroc 

Afrique subsaharienne Sénégal 

Source: Banque mondiale 

40 60 80 100 

Mais plus que d’un manque de formation, c’est avant tout d’un manque de cohérence entre le type de formations suivies et les réalités du marché de l’emploi dont pâtissent les jeunes Ivoiriens. Le taux de chômage des diplômés est même nettement plus élevé que la moyenne nationale (voire le graphique cidessous). << Beaucoup d’universités dispensent des enseignements théoriques, alors que les entreprises recherchent des compétences pratiques >>, observait l’économiste Séraphin Prao, en octobre dernier, dans les colonnes de Jeune Afrique. Un problème auquel s’est attaqué le ministère de la Jeunesse, l’Agence française de développement (AFD) et la Banque mondiale grâce à un programme de stages en entreprise. Pour les 140 000 jeunes accompagnés chaque année, près de 75

trouveraient un emploi à l’issue du dispositif. Une initiative à généraliser

Le paradoxe ivoirien : un taux de chômage plus élevé chez les diplômés 

Taux de chômage chez les 16-35 ans par niveau de formation (%)

Primaire 

0,05,010,015,0

|1,8| 3,4

Taux de 

16,8

chômage moyen 

117,2% Secondaire Supérieure Chiffres 2019 national 

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