L’imprévisibilité du président américain élu et sa volonté de rétablir des barrières douanières pourraient affecter l’économie du continent.
Les faits – La très grande majorité des dirigeants africains ont félicité Donald Trump pour sa victoire à la présidentielle américaine même si ce dernier n’a jamais
montré beaucoup d’appétence pour le continent. Ils souhaitent la poursuite des dispositifs de coopération et redoutent une augmentation des droits de douane, dont ils
pourraient faire les frais.
Donald Trump n’a jamais manifesté un intérêt débordant pour l’Afrique. Il ne s’y est pas rendu durant son premier mandat, préférant y envoyer son épouse Melania et Mike Pompeo, son secrétaire d’Etat, pour une unique visite chacun. Il avait aussi qualifié les nations africaines de<< pays de merde »>, banni l’entrée de son pays aux
Somaliens et Soudanais, réduit la contribution américaine aux budgets des opérations de maintien de la paix et à plusieurs autres agences onusiennes.
Trump élu : l’Europe au pied du mur
Toutefois, il avait maintenu le dispositif de coopération grâce aux efforts des démocrates, des républicains modérés et de certains conseillers de la Maison Blanche.
Les Etats–Unis sont le premier donateur pour l’aide publique au développement avec 66 milliards de dollars en 2023, le plus grand contributeur au Programme
alimentaire mondial et à l’Agence des Nations unies pour les réfugiés. Une grande partie de l’aide est dirigée vers l’Afrique et l’Asie, notamment sous forme d’assistance militaire.
Un soutien précieux pour nombre de pays confrontés à la menace terroriste. Une réalité qui explique les messages
de félicitations qui affluent de tous les palais africains. Félix Tshisekedi, Alassane Ouattara, Cyril Ramaphosa, Abdelmadjid Tebboune, Abdel Fatah al–Sissi ont tous fait
part au prochain locataire de la Maison Blanche de leur souhait de renforcer la coopération avec les Etats–Unis.
Mais, les experts redoutent une baisse des aides comme le demande régulièrement les républicains. Le manifeste politique de la Heritage Foundation, think tank proche de Trump, évoque la déconstruction de << l’Etat administratif >> et rejette les programmes liés à l’égalité des sexes, à la promotion de la santé reproductive ou à la lutte contre le changement climatique. Il privilégie le partenariat avec des ONG locales, des groupes confessionnels, les entreprises, les philanthropes privés…
« Contrer les incursions de la Chine dans >> le développement est un objectif clé
<< Exportations >>. << Contrer les incursions de la Chine dans le développement est un objectif clé », explique Cameron Hill, chargé de recherche principal au Centre de politique de développement, un cercle de réflexion australien qui a étudié le manifeste. Selon lui, le texte propose une approche très agressive en arrêtant le
financement à tout partenaire qui s’engage directement ou indirectement avec des entités chinoises.
Les Africains redoutent donc d’en faire les frais. Ils craignent aussi le retour des barrières douanières comme en 2018 et 2019. « Les mesures protectionnistes
américaines avaient alors eu peu d’effet sur les exportations africaines, hormis sur celles d’acier et d’aluminium en provenance d’Afrique du Sud et d’Egypte,
souligne une note récente de Global Sovereign Advisory.
Mais, d’après nos calculs, même si les Etats–Unis ne pèsent plus que 6% des exportations totales du continent, les effets directs d’une augmentation des droits de douane de 10% pourraient être cette fois plus importants. >>
Selon le cabinet de conseil parisien, l’Afrique du Sud, la Lybie, le Ghana, Madagascar et le Lesotho pourraient enregistrer une baisse de leur PIB due à ces restrictions
commerciales. Par ailleurs, les pays africains seraient aussi touchés par ricochet par la hausse des droits de douane américains ciblant les produits chinois en raison
de la baisse de dynamique économique qu’elle déclencherait dans l’empire du Milieu.
La dernière crainte est que Pékin déverse massivement en Afrique les produits qui ne pourraient plus être vendus aux Etats–Unis, particulièrement ses voitures électriques en Egypte et ses panneaux solaires en Afrique du Sud, au Nigeria et au Maroc, concurrençant ainsi les acteurs locaux.
Jean Moliere / L’Opinion