Bien que lui aussi radié de la liste électorale, et malgré tout candidat du PPA–CI à la présidentielle d’octobre, l’ancien chef de l’État n’a pas encore publiquement exprimé son soutien au patron du PDCI.
Depuis l’annonce, le 22 avril, de la radiation de Tidjane Thiam de la liste électorale, le Parti des peuples africains–Côte d’Ivoire (PPA–CI) de Laurent Gbagbo est resté silencieux. Certes, tout comme leurs collègues du Parti démocratique de Côte d’Ivoire (PDCI), ses députés ont boycotté, dès le lendemain, une séance à l’Assemblée nationale. Mais ils ont expliqué dans une déclaration avoir décidé de ne pas siéger pour << protester contre la non–inscription de Laurent Gbagbo sur la liste électorale ». L’ancien président n’a pas exprimé publiquement sa solidarité avec le successeur d’Henri Konan Bédié, qui connaît pourtant le même sort que lui. Bien que lui aussi candidat à la présidentielle d’octobre, ce dernier est en effet toujours ineligible, en raison d’une condamnation à 20 ans de prison dans l’affaire dite du «< casse » de la Banque centrale des États d’Afrique de l’Ouest (BCEAO).
<<<< Orientations fermes >>
<«<Le combat de Tidjane Thiam n’est pas celui de notre parti. Chacun affinera sa stratégie et le comité central du 26 avril donnera de premières pistes »>, glisse un membre de la direction du PPA–CI. En réalité, Laurent Gbagbo et Tidjane Thiam sont en froid depuis plus d’un an. Leur
dernier tête–à–tête a en effet eu lieu le 24 février 2024 à Mama, le village natal de Laurent Gbagbo, dans l’ouest du pays. À la sortie de cet entretien, Tidjane Thiam n’avait pas publiquement évoqué la radiation de Laurent Gbagbo de la liste électorale et son combat pour sa réinscription.
<< Tidjane Thiam est l’unique plan >> : en Côte d’Ivoire, le PDCI tente de sauver son candidat
Le patron du PDCI avait préféré évoquer les obsèques d’Henri Konan Bédié, l’élection présidentielle à venir, ses relations amicales avec le PPA–CI ou encore, la révision de la liste électorale qu’il appelait de ses vœux. Par ailleurs, selon l’entourage de Laurent Gbagbo, des propos attribués à Thiam et jugés durs à son égard, lui
auraient été rapportés.
C’est alors que l’ancien président lui aurait fermé ses portes. << Tidjane Thiam n’a jamais voulu être solidaire avec nous. Le président Gbagbo nous a donné des orientations fermes, à savoir continuer le combat sans le PDCI », assure un proche de Laurent Gbagbo.
L’intervention de Simone Ehivet Gbagbo
Le PPA–CI n’a donc logiquement pas rejoint la Coalition pour l’alternance pacifique–Côte d’Ivoire (CAP–CI) présidée par le patron du PDCI et dont la porte–parole
principale est Simone Ehivet Gbagbo, patronne du Mouvement des générations capables (MGC) et ex- épouse de Laurent Gbagbo. Le président exécutif de la formation de Gbagbo, Sébastien Dano Djédjé, travaille d’ailleurs à la structuration de l’appel de Bonoua, lancé par l’ancien président le 14 juillet 2024.
En Côte d’Ivoire, l’ultime bataille de Laurent Gbagbo
Lors de la deuxième réunion de la CAP–CI, en l’absence de Tidjane Thiam représenté Georges Philippe Ezaley, l’un des vice–présidents du PDCI, c’est Simone Ehivet Gbagbo qui avait insisté pour inclure dans le communiqué final les cas de Laurent Gbagbo et de Guillaume Soro, l’ex-Premier ministre en exil, lui aussi inéligible.
Premières tensions
Lors des élections locales de septembre 2023, à l’occasion desquelles le PPA–CI et le PDCI avaient noué une alliance, des tensions étaient déjà apparues entre les deux partis. Lors de rencontres organisées pour choisir les candidats, le PDCI avait parfois estimé que son partenaire, absent depuis des années des scrutins,
surestimait son implantation dans certaines zones. Contrairement aux législatives de 2021 pendant lesquelles des candidats du << vieux parti >> avaient fait place à ceux du mouvement Ensemble pour la démocratie et la souveraineté (EDS, formé par des pro- Gbagbo), Henri Konan Bédié avait cette fois–ci opté pour le maintien de ses concurrents qu’il estimait favoris.
Au final, peu de listes communes avaient été formées, et des représentants des deux partis s’étaient affrontés dans certaines localités. Yopougon avait notamment cristallisé l’attention. Michel Gbagbo, fils de Laurent Gbagbo, avait par exemple fait face à Adama Bictogo du parti au pouvoir, et Dia Houphouët Augustin Yohou, le député PDCI de la ville.
Fin janvier, les jeunes élus des deux partis avaient essayé d’aplanir les tensions autour d’un déjeuner. Mais cela n’avait pas suffi à rapprocher leurs deux leaders. L’annonce de la radiation de Thiam de la liste électorale
fera–t–elle évoluer leur relation? « On est prêts à se mettre ensemble, nuance un autre cadre du PPA–CI. Nos deux partis pourraient se rapprocher puisqu’ils subissent les mêmes persécutions de la part du même régime. Quelle crédibilité auraient des élections sans le PDCI, le
GPS, le PPA–CI, etc.?» Les déclarations, le 22 avril, de Tidjane Thiam au sujet d’un sondage le plaçant en tête de la course à la présidentielle devant Laurent Gbagbo ont néanmoins agacé dans les rangs de celui–ci. L’ex–chef de l’État doit s’exprimer le 26 avril.
Jean MOLIERE. Source JA