L’ancien chef de l’Etat ivoirien, qui a débarqué jeudi après-midi à Abidjan, a fait une seule brève apparition au balcon de son ancien siège de campagne devant des milliers de partisans en transe.
« Le jour où il fera jour » est donc arrivé. Pour Désirée, Basile et Christophe, comme pour des millions d’autres Ivoiriens, une aube nouvelle s’est levée sur leur pays jeudi 17 avril peu après 16 h 15 (18 h 15 à Paris) lorsque leur héros a débarqué d’un pas lent de l’avion qui le ramenait de Bruxelles et foulé le sol d’Abidjan.
« C’est irréalisable ce qui se passe, Laurent Gbagbo est plus qu’une personne. Avec lui nous ne formons qu’un », dit la première, joliment apprêtée d’une robe à l’effigie de son champion. « C’est en lui que le peuple se reconnaît », ajoute le second. « C’est comme Jésus de Nazareth entrant triomphalement à Jérusalem. Il est la joie, la paix, la tolérance », conclut le troisième avec une ferveur touchant à la dévotion.
Leur vision de la politique a tenu pendant dix ans sur une formule simple : « Gbagbo ou rien ». Et voilà que l’ex-président est revenu, justifiant selon eux, cette si longue attente et balayant toute modération. Les moments de liesse se prêtent mal à la raison.
Comme cela était prévisible, le programme établi avant son retour a volé en éclats dès son arrivée. L’ancien chef de l’Etat ivoirien (2000-2010) ne s’est pas arrêté au pavillon d’honneur de l’aéroport que le gouvernement avait mis à sa disposition. Il n’est pas sorti de son véhicule à vitres fumées pour saluer les cadres de son parti et les chefs traditionnels qui l’attendaient là depuis plusieurs heures.
Sa seule apparition a été brève : une salutation au balcon de son ancien siège de campagne devant des milliers de partisans en transe, quelques mots pour se dire « heureux de retrouver la Côte d’Ivoire et l’Afrique » et des remerciements à ses fidèles lieutenants qui l’ont soutenu pendant son absence.
Popularité intacte
S’il n’a pas eu « l’accueil triomphal » qu’espéraient ses militants, Laurent Gbagbo a cependant pu constater que sa popularité demeure intacte. Sur le chemin de son retour, qui s’est achevé dans la maison de sa seconde épouse, Nady Bamba, ils étaient encore des milliers à avoir bravé depuis le matin les jets de gaz lacrymogènes et de grenades assourdissantes. Combien auraient-ils été sans cette dispersion systématique ? Nul ne le saura jamais.
A Port-Bouët, à quelques centaines de mètres de l’aéroport, comme dans d’autres communes d’Abidjan, tout était pourtant prêt pour offrir une marée humaine à celui que ses militants considèrent encore comme « le vrai président des Ivoiriens ».
Justin Katinan Koné, porte-parole de Laurent Gbagbo, a indiqué à l’AFP que ce retour étant « le signe de départ de la réconciliation », il ne devait pas être « terni » par des considérations liées à son accueil par ses partisans.