Un gouvernement remanié a été présenté ce jeudi 20 juillet 2023 par la présidence de la république. Mais au cœur de l’été, le timing questionne.
Fin du suspense. Après avoir maintenu Elisabeth Borne à son poste de Première ministre, Emmanuel Macron lui avait demandé de proposer quelques ajustements au sein du gouvernement. Des changements que le Président vient de valider ce jeudi 20 juillet 2023.
Mais, alors que la France entame sa troisième semaine de vacances scolaires, un tel timing interroge. Pourquoi tout changer en plein été ?
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100 jours d’apaisement ?
En pleine crise engendrée par la très contestée réforme des retraites, le Président avait, en avril dernier, espéré un « nouveau départ » avec une période de 100 jours pour réparer le pays. Finalement, il n’en a rien été.
La France a connu toute une série d’émeutes liées à la mort de Nahel, jeune homme de 17 ans, tué par un policier dans des circonstances polémiques.
Marlène Schiappa lourdement décriée par le Sénat pour son implication dans le Fonds Marianne, a pris la porte, remerciée.
Si les malversations sont avérées, c’est très grave. Le risque encouru, politiquement, invitait plutôt à la remercier.
Sans compter quelques récompenses remises par l’Élysée, pas du goût de tous. « Et puis, on se remet doucement à parler d’Uber Gate [ou comment Uber a réussi à contourner la loi et à imposer une régulation plus favorable dans plusieurs pays, NDLR] », rappelle, auprès d’actu.fr, Virginie Martin, politiste et docteure en Sciences politiques.
Pour rappel, la commission d’enquête pointe une « relation opaque et privilégiée » entre Emmanuel Macron et la plateforme.
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Besoin d’ajustements
« Il y avait besoin d’ajustements », note la politiste, également professeure à Kedge Business School. « Emmanuel Macron est obligé de se séparer de Marlène Schiappa, par exemple. Au sein même du gouvernement, ça grinçait des dents. Certains commencent à voir 2027 poindre, les européennes… »
Pour Virginie Martin, c’est le bon moment pour procéder à ces petites adaptations.L’idée c’est probablement de faire passer les soucis sous le tapis maintenant, pour ne pas qu’ils ne lui reviennent comme un boomerang à l’automne.
Ce remaniement d’ajustement est le « signal d’une continuité », commente, auprès d’actu.fr, Olivier Rouquan, politologue, chercheur associé au Cersa.
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Un timing qui interroge
Sauf qu’en plein milieu du mois de juillet, le timing de ce remaniement questionne forcément. « C’est étonnant », confirme Olivier Rouquan. « C’est une façon d’éviter les commentaires sur les 100 jours », et montrer qu’après, il ne se passe pas rien.
Ça aurait été mal perçu. Ensuite, je pense qu’il y avait une demande d’Élisabeth Borne et ça a du sens politiquement. On sort la société civile du gouvernement et on rajoute des parlementaires qui ont réussi.
Consolider les troupes
Ce remaniement semble donc léger. « Il s’agit surtout de consolider ses troupes et d’envoyer un message positif aux députés de son bord ». Car pour rappel, il n’y a pas si longtemps que ça, on ne parlait pas de remaniement mais de dissolution de l’Assemblée nationale.
Constat partagé par Olivier Rouquan : « On se sépare d’éléments qui semblent fragiles et on consolide aussi bien Elisabeth Borne (avec la nomination d’Aurélien Rousseau, nouveau ministre de la Santé) qu’Emmanuel Macron (avec la nomination de Sabrina Agresti-Roubache, secrétaire d’État chargée de la Ville) ».
Récompenser les parlementaires
En nommant Aurore Bergé, par exemple, Emmanuel Macron récompense son implication pendant la réforme des retraites. « Elle assume son rôle à l’Assemblée, elle est montée au créneau et a fait preuve de courage. Ils ne sont pas 150 millions à faire ça », reconnaît la politiste.
Une récompense similaire pour Thomas Cazenave, Prisca Thevenot ou Sabrina Agresti-Roubache. « D’une situation d’ultra fragilité — beaucoup pensaient que la Macronie allait s’écrouler – on passe à une consolidation du mouvement », remarque Virginie Martin.
Par le passé, on lui a beaucoup reproché de ne pas créer une “Macronie”. « D’ailleurs, on se demande encore ce que c’est, en dehors d’une série d’opportunités », questionne la politiste.
Avec ces nominations, il renforce son mouvement. Il prend des gens de son camp politique sans aller chercher en dehors.
Ce remaniement contente aussi les alliés proches du pouvoir. Côté MoDem, Philippe Vigier entre au gouvernement en charge des Outre-mer, Christophe Béchu (Horizons) reste ministre de la Transition écologique
« Le cœur du problème, c’est de faire voter les textes. Il faut au moins essayer de limiter les divisions internes », conclut Olivier Rouquan. Car le vrai souci d’Emmanuel Macron et d’Elisabeth Borne n’a pas changé : réformer sans majorité absolue à l’Assemblée.
Emmanuel Macron et Elisabeth Borne ont tranché, et le nouveau gouvernement a été ajusté. Sans trop de surprises. Voici les noms à retenir, et leurs ministères respectifs.
Les ministres
- Ministre de l’Éducation Nationale et de la Jeunesse : Gabriel Attal (il remplace Pap Ndiaye)
- Ministre des Solidarités : Aurore Bergé (elle remplace Jean-Christophe Combe)
- Ministre de la Santé et de la Prévention : Aurélien Rousseau (il remplace François Braun)
- Ministre de l’Économie, des Finances et de la Souveraineté industrielle et Numérique : Bruno Le Maire
- Ministre de l’Intérieur et des Outre-mer : Gérald Darmanin
- Ministre de l’Europe et des affaires étrangères : Catherine Colonna
- Ministre de la Justice et Garde des Sceaux : Eric Dupond-Moretti
- Ministre des Armées : Sébastien Lecornu
- Ministre du Travail, du Plein emploi et de l’Insertion : Olivier Dussopt
- Ministre de l’Enseignement supérieur et de la recherche : Sylvie Retailleau
- Ministre de l’Agriculture et de la Souveraineté alimentaire : Marc Fesneau
- Ministre de la Transition écologique et de la Cohésion des territoires : Christophe Béchu
- Ministre de la Transition énergétique : Agnès Pannier-Runacher
- Ministre de la Culture : Rima Abdul-Malak
- Ministère de la transformation et de la fonction publiques : Stanislas Guérini
- Ministre des Sports : Amélie Oudéa-Castéra
Les ministres délégués
- Logement : Patrice Vergriete (il remplace Olivier Klein)
- Outre-mer : Philippe Vigier (il remplace Jean-François Carenco)
- Handicap : Fadila Khattabi (elle remplace Geneviève Darrieusecq)
- Comptes publics : Thomas Cazenave (il remplace Gabriel Attal)
- Égalité entre les femmes et les hommes et lutte contre les discriminations : Bérangère Couillard (elle remplace Isabelle Rome)
- Porte-parole du gouvernement : Olivier Véran, qui reste à son poste, contrairement à ce qui était pressenti
- Industrie : Roland Lescure
- Relations avec le Parlement : Franck Riester
- Transition numérique et Télécommunications : Jean-Noël Barrot
- Petites et moyennes entreprises (PME), Commerce, Artisanat et Tourisme : Olivia Grégoire
- Commerce extérieur, Attractivité et Français de l’étranger : Olivier Becht
- Enseignement et formation professionnels : Carole Grandjean
- Transports : Clément Beaune
- Organisation territoriale et Professions de santé : Agnès Firmin Le Bodo
- Collectivités territoriales et ruralité : Dominique Faure
Les secrétaires d’État
Chez les secrétaires d’État, on note le départ (pressenti) de Marlène Schiappa, devenue bien trop indésirable depuis le scandale du Fonds Marianne et son interview – dont le timing n’aurait pu être pire – au magazine Playboy.
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- Ville : Sabrina Agresti-Roubache (elle remplace Olivier Klein également)
- Jeunesse et du SNU : Prisca Thévenot (elle remplace Sarah El Haïry)
- Biodiversité : Sarah El Haïry (elle remplace Bérangère Couillard)
- Enfance : Charlotte Caubel
- Mer : Hervé Berville
- Citoyenneté : Sonia Backès
- Europe : Laurence Boune
- Développement de la francophonie : Chrysoula Zacharopoulou
- Anciens combattants et mémoire : Patricia Mirallès
Emmanuel Macron devrait bientôt s’exprimer
Après ce nouvel épisode politique, Emmanuel Macron doit préparer la rentrée en rappelant « le cap clair » qui est le sien et en rassemblant fortement après cette période, expliquait l’Élysée avant le remaniement.
Le Président devrait s’exprimer directement auprès des Français avant la fin de la semaine. En attendant, dès ce vendredi 21 juillet, un Conseil des ministres est prévu, à 10 h, avec la nouvelle équipe remaniée, a prévenu l’Élysée.
JM source : actu.fr