25 avril 2024
Paris - France
POLITIQUE

Ouattara, Gbagbo, Bédié : et s’ils nous surprenaient

Les trois monstres sacrés de la politique 

ivoirienne vontils renoncer à jouer le match retour en 2025? On se prend à rêver..

Abidjan, jeudi 14 juillet, en fin daprèsmidi. Sur le perron du petit palais de la Présidence, le protocole est sur le quivive. Pour la première fois depuis la fin de 2010, Alassane Ouattara, Laurent Gbagbo et Henri Konan Bédié ont rendezvous pour une rencontre au sommet. Une rencontre historique selon la plupart des observateurs et des médias locaux, minutieusement préparée par les étatsmajors respectifs des trois monstres sacrés de la politique ivoirienne

Décrispation 

Latmosphère est particulièrement détendue. Le chef de lÉtat et les deux anciens présidents se donnent laccolade, sourient, se tiennent par la main comme danciens copains décole qui ne se sont pas vus depuis des lustres et prennent plaisir à se retrouver pour évoquer le bon vieux temps. « La rencontre de ce jour a été une rencontre de retrouvailles destinée à renouer le contact et à échanger dans la vérité sur toutes les grandes questions. Le président de la République et ses deux prédécesseurs ont exprimé leur volonté de faire de ce premier rendezvous un levier de décrispation du climat politique et social en Côte dIvoire », a expliqué le benjamin, Laurent Gbagbo, au sortir de leur entrevue, qui a duré plus dune heure et au cours de laquelle les sujets de la cherté de la vie, des grands chantiers en cours ou des conséquences de la guerre en Ukraine ont été abordés

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« Les uns et les autres considèrent quil sagit dune réunion extraordinaire. Mais on doit considérer quelle est ordinaire et quelle se répétera régulièrement. À chaque fois que mes prédécesseurs auront le temps de reprendre ces échanges, je ferai appel à eux pour recueillir leurs avis et recommandations. Ce sera une bonne chose pour la nation de les entendre et de les écouter, [en raison de leur connaissance du pays, [de] leur expérience et [du] poids politique quils représentent », a ajouté Alassane Ouattara

Éléphants et fourmis 

Quil est loin le temps de la guerre, des crises postélectorales, des parties de poker menteur, des tensions et des menaces de coups dÉtat ! Lheure est à lapaisement et au mantra en vigueur depuis plus dune décennie : la réconciliation. Mieux, les ouailles, mais aussi les concurrents de nos trois ténors, nont plus aucune raison de plastronner ni de sécharper. Leurs désaccords ou leur entente dictent depuis près de trente ans le climat politique national. Quand les éléphants ne se battent plus, les fourmis cessent de mourir..

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On ne peut que se féliciter de cette initiative et de la décrispation qui en découle. Attention cependant, ce nest quun premier pas tant les sujets de contentieux sont nombreux et restent sur la table : amnistie de prisonniers, retour des exilés, réforme de la Commission électorale nationale indépendante, découpage électoral, recouvrement des avantages liés au statut dancien chef de lÉtat de Laurent Gbagbo ou au statut dun certain nombre de ses proches.... Espérons que les fruits passent la promesse des fleurs

Renouvellement générationnel 

Si lheure nest plus à linquiétude, du moins en attendant les élections locales de 2023, il nest pas interdit de rêver et dattendre davantage de Ouattara, Bédié et Gbagbo, qui auront respectivement 83, 91 et 80 ans à lorée de la prochaine présidentielle, à la fin de 2025. Soyons fous : ils pourraient tous trois, à loccasion dune prochaine réunion tripartite, nous annoncer de concert quils renoncent définitivement à « jouer le match retour », donc à concourir

Ils désigneraient chacun celui ou celle appelé à reprendre le flambeau au sein de leur formation, quitte à ce queuxmêmes en conservent les nes dans un premier temps. Veeu pieux ? Ce serait en tout cas un geste symbolique fort et inédit, qui concrétiserait leur volonté de réconciliation et démontrerait quils se préoccupent davantage de lavenir du pays que de régler leurs comptes personnels. Cela illustrerait, surtout, le renouvellement générationnel tant attendu des Ivoiriens. À condition quils prennent ensemble cette décision et la mettent en pratique concomitamment. Cest, après tout, le sens de leur histoire commune : leur affrontement accapare la scène politique ivoirienne depuis si longtemps quils ne peuvent la quitter sans crainte que tous les trois en même temps

JA

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