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Côte d’Ivoire : réconciliation nationale ou impunité ?

L’ex-président ivoirien, Laurent Gbagbo a regagné son pays depuis le 17 juin dernier. Toutes les formations politiques évoquent la réconciliation nationale. Le contraste est éloquent car cette rhétorique se veut un concept creux à géométrie variable qui rime avec impunité avant l’explosion d’une autre crise politique.

Une idéaliste entente entre les leaders politiques Bédié, Gbagbo, Ouattara, Soro, Blé Goudé… C’est à cela que s’apparente une définition de la réconciliation nationale dans l’imagerie populaire des Ivoiriens. Cela traduit d’entrée le culte de la personnalité et cette prise d’otage de la société ivoirienne par la classe politique. Parlons plus de décrispation ou d’apaisement dans le champ politique ivoirien.

Par-dessus l’interprétation de ce terme, rappelons qu’il tire son origine de l’ère Félix Houphouët Boigny. Après avoir enfermé ses opposants, en 1963, accusés de mener des activités subversives d’inspiration communiste, Houphouet les libère en 1967 après avoir consolidé son pouvoir. Il les appelle à une conciliation nationale.

Le terme refait surface dans les années 1993 avec le préfix ré. On parle de réconciliation nationale pour appeler à l’entente entre les différents acteurs politiques principalement les héritiers d’Houphouët (Bédié et Ouattara) ainsi que l’opposant Laurent Gbagbo.

Les antagonismes politiques ayant conduit au coup d’Etat du 19 septembre 1999, les auteurs appellent à l’apaisement sous le vocable réconciliation nationale. Les élections calamiteuses de l’année 2000 marquée par un soulèvement populaire contre la junte militaire de Guei Robert et menant Laurent Gbagbo au pouvoir d’Etat, entraînent elles aussi leurs victimes. Le bilan officiel des violences de la fin de l’année 2000 est de 303 morts, 65 disparus et 1 546 blessés.

On fait encore recours à l’impunité ou à la réconciliation nationale avec la rencontre entre Bédié, Gbagbo, Guei et Ouattara en 2001 en prélude à la réconciliation nationale. Le Forum pour la réconciliation nationale tenu du 9 octobre au 18 décembre 2001 a vu la participation de toutes les formations politiques. Il aura été finalement un one man show où chacun crachait sa rancœur. Résultat : une tentative de coup d’Etat se mue neuf mois plus tard en rébellion armée.

Les différents pourparlers aboutissent finalement à un gouvernement d’union nationale et Gbagbo décrète une amnistie aux rebelles en avril 2007. La suite est connue : la crise postélectorale et son corollaire de 3000 morts dont les auteurs jouissent toujours de l’impunité.

En somme, tous appellent à la démocratie mais ne sont pas des démocrates. Les hommes politiques prennent le dessus sur les hommes d’Etat. La réconciliation s’apparente à un calme plat avant la tempête tant les véritables maux sont occultés par les égos des seigneurs de la politique ivoirienne.

Cyrille NAHIN

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